Martin Léon lançait, en novembre 2007, l'excellent - et très personnel - album Le facteur vent. Alors que le facteur éolien lui-même défraie la chronique en ces jours de froid record, l'auteur-compositeur-interprète remonte sur scène, les 23 et 24 janvier au National, avec le goût de réchauffer l'atmosphère...

Il faisait froid en titi, le jour de l'entrevue, mais Martin Léon avait un céleri à la bouche et des lunettes de soleil sur le front. Il est toujours comme ça, Martin Léon, un peu à contre-courant, un peu hors norme, plus curieux qu'ambitieux.

 

Du moins de nos jours. À ses débuts avec le groupe Ann Victor dans les années 90, le jeune auteur-compositeur-interprète se voyait plutôt big. Et puis, le temps a passé, les illusions aussi, l'ambition idem.

Après la sortie en 2002 de son étonnant premier album solo Kiki BBQ, dont la chanson C'est ça qui est ça a bien marché, il a pris pas moins de cinq ans avant de lancer un autre album (Le facteur vent), préférant plutôt composer des musiques de films (il a notamment été formé par Ennio Morricone lui-même, à Sienne!) et collaborer aux très chouettes albums pour enfants de l'étiquette La Montagne secrète. Et si on ne s'abuse pas, ça fait trois ans qu'il n'est pas monté sur scène - en fait, sa dernière apparition «publique», c'est sur l'album hommage à Gaston Miron, Douze hommes rapaillés.

«C'est parce que je ne voulais vraiment pas faire de show après la sortie du Facteur vent, explique-t-il. C'est un album dur à écouter, je le sais, il va chercher creux. En tout cas, moi, il me fait cet effet-là. Et puis, je l'ai réécouté il y a peu de temps pour la première fois et j'étais content. J'ai réécouté Kiki BBQ et je l'étais aussi. Sur chacun, il y avait deux, trois tounes qui me donnaient envie de faire un show... Alors, je me suis décidé.»

Le goût de donner

Décision difficile, c'est clair, car Martin Léon a choisi, il y a cinq ans, de changer de vie, tout simplement: «Je suis profondément convaincu que la recherche du pouvoir et de la reconnaissance s'oppose à la recherche de l'amour, celui de la vie, de la famille, des amis, de son amoureuse. Or, les moments où j'ai cherché la reconnaissance ont été les moments les plus tourmentés de ma vie. J'ai donc décidé de changer... Je crois fermement qu'on a le pouvoir de se transformer ET d'aider son voisin.»

L'automne dernier, en se disant que ça pourrait peut-être «aider son voisin» - ou du monde, en tout cas -, il a finalement décidé de présenter quelques spectacles. Et a offert des prestations dont les critiques - et le monde - ont souligné la chaleur, la simplicité, le dialogue entre l'artiste et le public: «J'ai la chance d'avoir rencontré des publics qui avaient soit envie d'écouter, soit envie de partager», explique-t-il.

À ses quatre musiciens (qui seront avec lui au cours de la tournée à compter de février), se joindra Rick Haworth, «le cow-boy de la pedal steel», pour les représentations à Montréal.

Mais bien sincèrement, ce n'est ni du spectacle ni de la tournée dont Martin Léon a envie de parler. Il préfère discuter de voyages ou de son inquiétude pour les jeunes: «Je trouve qu'on ne leur dit jamais que, entre être un winner et être un loser, il y a 350 autres possibilités, 350 autres possibilités d'être heureux. On n'est pas obligé d'être un héros, et on n'est pas un zéro parce qu'on n'est pas un héros.»

«J'ai pas une voix comme Garou, conclut-il. Moi, ce que j'ai le goût de faire, c'est de donner. Donner du temps, donner des chansons. Je sais que ça fait tata, dit comme ça, mais c'est ça pareil. Je m'entoure de monde que je trouve bon et fin - c'est important pour moi, les gens qui sont fins -, et je pense que c'est à mon avantage que mon voisin soit heureux. Toi, qu'est-ce que t'en penses?» J'en pense que le facteur vent, finalement, ça peut aussi réchauffer...

Martin Léon en spectacle les 23 et 24 janvier au National, puis en tournée au Québec.