Depuis leurs débuts, les Cowboys fringants ont toujours mis, dans leurs disques, leur côté sain et leur côté givré: les chansons à texte côtoyaient les chansons à boire. Leur album L'expédition, lancé aujourd'hui en public, quatre ans après La grand-messe, rompt avec la tradition: cette fois, le quatuor privilégie son côté «fibres» avec un album relativement calme, empreint de courage et de compassion. Et son côté «sucré» ? On le retrouvera le 14 octobre sur un autre album, baptisé Sur un air de déjà vu. Pour souligner la sortie de L'expédition, voici un survol de ses 14 chansons, toutes signées Jean-François Pauzé.

1 - Droit devant

La voix de Karl Tremblay, très posée (désolée pour le mauvais jeu de mots) et le violon de Marie-Annick Lépine - mais aussi son piano, très présent - pour une chanson qui invite un petit garçon à entrer dans la vie. Extrait: «Que l'on soit minus ou géant/Il faut être fort pour traverser le temps/Bonne chance.»

 

Karl Tremblay: «C'est vrai que ma voix est plus douce, pour respecter la nature des chansons. Et puis, après 12 ans de tournées, ça serait triste qu'elle ne prenne pas une coche de plus (rires). Disons que sur L'expédition, c'est Karl qui chante, et que Sur un air de déjà vu, c'est le cave qui chante (rires)!»

2 - Chêne et roseau

Une très jolie intro planante, qui devient une chanson rythmée, inspirée de la fable de La Fontaine (Le chêne et le roseau). Mais là où La Fontaine concluait que le chêne, tout massif qu'il est, casse sous le vent, alors que le roseau, qui plie, résiste, Jean-François Pauzé fait de l'arbre et la plante aquatique des voisins qui pensent avoir plus raison que l'autre.

Moralité: il faut «tomber et nous relever/retomber/tomber et nous relever».

Jean-François Pauzé: «C'est à cause de mon acupunctrice: une semaine, elle m'a dit que j'étais un roseau qui pliait trop, et deux semaines plus tard, que j'étais comme un chêne trop rigide (rires)!»

3 - Entre deux taxis

Chanson d'amour conjuguée au présent du mélancolique! Le morceau typiquement Cowboys, qui mêle violon expressif, guitare efficace, quelques notes de piano, fatalisme, nostalgie, ingénuité

Karl Tremblay: «Le clip (fait par l'illustratrice douée Valérie Dupras, soeur de Jérôme) sort en même temps que l'album» (c'est-à-dire aujourd'hui).

4 - La Catherine

Une petite chanson endiablée qui tient à la fois de Bobépine et de la ritournelle «Joséphine, la pas fine, t'as fait pipi dans tes bottines, rue Sainte-Catherine!». Bref, un hymne à la rime en «ine». La Catherine, fille délurée, est l'antithèse de Hannah.

Jean-François Pauzé: «C'est une chanson faite d'un peu toutes les filles toutes particulières que je côtoie, écrite juste pour le plaisir.»

5 - Histoire de pêche

Avec des accents de reel irlandais, une histoire de pêche hélas véritable, où un «petit pêcheur gaspésien» et tous ses comparses vident peu à peu la mer de toutes les morues

Jérôme Dupras: «Avec La Catherine, c'est une des chansons qu'on a cassées en show cet été.»

6 - Bobo

Un air triste, dans la tonalité de Toune d'automne, mais avec beaucoup de piano, où il est question des difficultés de la vie, mais aussi et surtout de la vie elle-même, qui réussit toujours à nous fait aimer la vie; il faut juste soigner ses bobos intimes.

Marie-Annick Lépine: «Pour une fois, j'avais un vrai piano à queue plutôt qu'un clavier. J'ai construit les arrangements de la chanson seule au piano au studio Victor, et Jérôme est venu ajouter quelques accents de basse après»

7 - Rue des souvenirs

La chanson nostalgique sur l'enfance passée, dans la lignée de Les étoiles filantes, avec en plus une réflexion mélancolique sur le vieillissement de la population.

Jean-François Pauzé: «On s'ennuie tous du temps où on était petit, où on n'avait pas de souci, où l'important, c'était de jouer au hockey et de courir après les petites filles. C'est difficile, la vie adulte»

8 - Monsieur

Sur une mélodie entraînante, un texte où on croit reconnaître à la fois Jean Charest et Stéphane Dion - mais sans la dénonciation agressive et cynique de Lettre à René Lévesque et La manifestation. Plutôt un constat empreint de compassion envers la vanité des hommes de pouvoir

Jean-François Pauzé: «C'est pas une chanson engagée, c'est plutôt le portrait d'un être humain. Je ne suis pas fasciné par la politique, mais je le suis par les hommes politiques.»

9 - La tête haute

Une chanson à la mémoire d'un fan des Cowboys, mort du cancer à 19 ans. Aussi triste que Plus rien, mais avec un refrain rempli de courage et la voix de Karl, particulièrement tendre.

Extrait: «J'ai tout surmonté, la tête baissée/Si j'redescends, ce s'ra la tête haute.» Ça va être dur d'écouter cette chanson pour tous ceux qui sont atteints et ceux qui les entourent

Jérôme Dupras: «J.-F. l'a écrite en passant à ce fan, vraiment un chic garçon, il était même venu jouer de la batterie avec nous au Métropolis, sa mort a été un choc pour nous»

10 - Les hirondelles

Une très jolie intro au violon (signée Marie-Annick Lépine) précède cette valse mélancolique sur des êtres qui semblent au-dessus de leurs affaires, mais qui sombrent intérieurement, incapables de communiquer leur détresse.

Extrait: «L'image que l'on donne n'est pas toujours la bonne»

Marie-Annick Lépine: «Celle-là, elle est dans mon top 5.» Jean-François: «Moi, elle dans mon top 14 (rires).» Karl Tremblay: «On dirait comme une comptine triste...»

11 - Tant qu'on aura de l'amour

L'équivalent de la chanson Le frigidaire de Tex Lecor (»Tant qu'il restera quelque chose dans le frigidaire»), mais au XXIe siècle; on entend Karl dire au début: «Tant qu'on aura de l'amour, chanson naïve.» Naïve, oui, mais fort utile pour trouver quelque chose de positif dans la plus négative des expériences.

Jean-François Pauzé: «Je voulais écrire une couple de chansons joyeuses. Mais j'ai trouvé ça difficile. Je n'en étais pas sûr, mais les autres l'aimaient.» «Beaucoup», ajoute Marie-Annick Lépine.

12 - La bonne pomme

Un autre portrait féminin dont Jean-François Pauzé a le secret (La reine, Hannah, Toune d'automne) sur une jeune femme qui survit à sa famille dysfonctionnelle, seule bonne pomme parmi les fruits pourris, et qui se termine en jolie chanson d'amour.

13 - Train de vie

Une guitare chaleureuse et simple, un violon qui respire derrière, pour une ode sans prétention à la vie qui chemine et à la nécessité parfois, de regarder passer le train au lieu d'essayer d'y monter à tout prix.

Jean-François Pauzé: «C'est une variation sur une phrase que dit toujours Karl: Tout passe vite, le bon comme le mauvais!»

14 - Une autre journée qui se lève

Des airs de musique classique (on dirait du Mozart!) pour cette petite chanson qui relate une journée sur Terre, avec un sourire en coin, bref le contraire absolu de la pessimiste L'hiver approche: «On ne retrouvera jamais l'émerveillement que l'on avait enfants () Mais il ne faudrait pas non plus s'en faire accroire () La vie n'est pas juste un long purgatoire.» Avec, à la toute fin, un «Petit blues de la vie»: «Maudit maudit lundi, le travail, la routine, le train-train quotidien, trop frette l'hiver, trop chaud l'été»

Jean-François Pauzé: «C'est notre Bohemian Rhapsody à nous (rires), une finale comme une comédie musicale.» Karl Tremblay: «Et le Blues de la vie, tu vas pouvoir l'entendre au complet sur l'album Sur un air de déjà vu. Tu vas comprendre pourquoi elle n'est pas sur L'expédition!»

***

Les Cowboys fringants, L'expédition,

La Tribu/DEP, en magasin aujourd'hui

***1/2