Installé confortablement dans un divan de son salon, Brian Wilson sourit nerveusement. L'ancien auteur-compositeur des Beach Boy lancera le 2 septembre son deuxième album en solo That Lucky Old Sun, quelque quatre ans après la sortie de Smile», un album fort attendu qui a été très encensé par la critique.

Il a commencé à interpréter certaines de ses nouvelles chansons en spectacle.

«Ce nouvel album est aussi bon que tous ceux des Beach Boys, assure-t-il. Je suis fier quand je joue ces chansons en spectacle. J'ai ce sentiment étrange qui noue mon estomac: «oh mon Dieu! cela sonne si bien!"»

Il y a deux ans, Wilson a enregistré 18 chansons, raconte-t-il. Il en a choisi 10 pour Capital/EMI. Il a composé lui-même les arrangements, laissant les paroles à son collègue Scott Bennett et les interludes narratifs à son collaborateur de longue-date, Van Dyke Park.

Résultat: un mélange de chansons pops endiablés et de ballades douces au piano. Les dernières notes de la pièce-titre, une reprise de Louis Armstrong, s'incrustent dans Morning Beat, une chanson sautillante, donnant le ton à l'album.

«Van Dyke Paris, Brian et Melinda (la femme de Wilson) pensaient que cela devait être une lettre d'amour à Los Angeles. Brian avait alors 65 ans. Le temps était venu pour lui de contempler sa légende et d'être un brin nostalgique», dit Bennett.

Des chansons comme Forever She'll Be My Surfer Sun rappellent les mélodies des Beach Boys tandis Mexican Girls ajoute un peu de salsa à la sauce. Midnight's Another Day et Oxygen to the Brain font référence à la période noire de Wilson, dans les années 1970 et 1980 alors qu'il s'est retiré loin des réflecteurs, se droguant et gagnant du poids.

Midnight's Another Day, interprétée au seul piano, est la chanson favorite de Wilson. «Un mélange d'introspection et d'émotions que j'éprouve au milieu des gens», dit-il.

La dernière chanson Southern California retourne à la fondation des Beach Boys, concluant l'album sur une note enjouée. Wilson chante: It's magical/Living your dream (C'est magique/De vivre son rêve).

«Il est vrai que Brian a traversé une période difficile en raison de sa santé mentale mais je serais prêt à tuer pour avoir un répertoire similaire au sien et avoir donné des spectacles partout avec ses frères comme ils l'ont fait», dit Bennett.

Ce dernier confirme que Wilson doit prendre plusieurs doses d'antidépressif.

Malgré cela, Wilson traverse une des périodes les plus créatrices de sa vie.

L'inspiration lui vient le soir lorsqu'il s'assit à ses claviers situés dans une pièce de musique où le violet donne le ton.

«Quand je suis aux claviers, je me sens béni comme si j'avais un ange au-dessus de ma tête. Je me sens très béni. Quand nous (les Beach Boys) avions enregistré God Only Knows, j'avais le même sentiment. Quelque chose de divin m'a traversé l'esprit«, raconte Wilson.

Bougeant ses mains, le musicien ajoute: «Je réfléchis toujours aux mélodies. Elles viennent de mon cerveau et des touches du clavier. Mes claviers sont si plaisants que j'ai envie d'écrire des mélodies.»

Mais la vie trépidante des studios et des tournées peut être écrasante. Une maison remplie d'enfants - il en trois d'un deuxième mariage - et de chiens peut être «très bruyante» et «très énervante», mentionne le musicien. Pour s'en reposer, il se promène dans un parc situé près de chez lui.

«Les enfants me rendent un peu nerveux, reconnaît Wilson. Parfois, j'ai envie de m'enfuir de la maison et des mes enfants mais comme je les aime beaucoup. J'aime mes enfants... La paix revient dans la maison vers 22h00 quand je vais me coucher. C'est la paix d'esprit. Tout est calme la nuit. C'est plus difficile le jour.»

Il n'est guère enthousiaste au sujet du statut actuel des Beach Boys, lui qui s'est distancé des membres survivants du groupe en raison, entre autres, de problèmes juridiques. «Je ne veux pas revenir avec eux. C'est le groupe de Mile (Love) et de Bruce (Johnston) maintenant. Je suis à mon compte. Je préfère cela à un retour avec les Beach Boy.» dit-il.

Cela n'empêche pas le chanteur de piger allègrement dans le répertoire ancien. Il aime la scène même s'il éprouve le trac soir après soir. Il tente de s'en défaite à l'aide de massages et de prières.

Son plus grand regret ? «La drogue qui m'a bousillé l'esprit. Le LSD, la marijuana, la cocaïne», répond-il.

Wilson ne veut pas laisser son glorieux passé s'interposer devant son ambition. Il compte enregistrer un autre album comprenant une version douce de Proud Mary. «Paul McCartney est la seule vedette avec laquelle j'aimerai travailler.» Il souhaiterait aussi enregistrer un album de rock n» roll inspiré des albums produits par Phil Spector. «Un album de hard rock avec des arrangements orchestraux. La totale quoi!»