L'écrivain algérien Kamel Daoud, prix Goncourt du premier roman 2015, cible de menaces de mort en Algérie pour ses propos sur l'islam, a reçu le prix Jean-Luc Lagardère du «journaliste de l'année» pour ses chroniques dans le magazine Le Point, a annoncé Lagardère.

Il devait recevoir cette récompense jeudi soir en présence du Premier ministre français Manuel Valls.

Le jury de 17 journalistes présidé par le directeur de Libération Laurent Joffrin a attribué à l'auteur de Meursault, contre-enquête ce prix doté de 10 000 euros (14 500 $), qui avait été attribué en 2015 à la rédaction du journal satirique Charlie Hebdo.

Kamel Daoud vient de remporter un procès en Algérie contre un prédicateur qui demandait son exécution publique pour «apostasie».

Fin 2014, l'imam Abdelfatah Hamadache Ziraoui avait appelé les autorités algériennes à le condamner à mort après une intervention de M. Daoud dans une émission française, où il avait critiqué le rapport des musulmans à leur religion.

Le mois dernier, la justice algérienne a condamné l'imam à six mois de prison dont trois ferme, une décision sans précédent. Kamel Daoud a estimé que le tribunal correctionnel d'Oran avait rendu une «décision courageuse».

Mais parallèlement le journaliste s'est retrouvé au coeur d'une polémique des deux côtés de la Méditerranée pour avoir dénoncé le «rapport malade à la femme» dans le monde arabo-musulman. Un groupe d'universitaires français l'a même accusé en février «d'alimenter les fantasmes islamophobes»

Ce collectif réagissait à deux textes de Kamel Daoud sur les agressions sexuelles commises pendant la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne. Kamel Daoud y affirmait notamment que «le sexe est la plus grande misère dans le monde d'Allah» et que «la femme est niée, refusée, tuée, voilée, enfermée ou possédée».

Face aux critiques, plusieurs voix des deux côtés de la Méditerranée se sont élevées pour défendre Kamel Daoud, dont Manuel Valls qui a appelé à soutenir «sans aucune hésitation» l'écrivain.

Son compatriote, le romancier Boualem Sansal, avait lui dénoncé «une forme de terrorisme intellectuel» contre Kamel Daoud.

Mais ce dernier a annoncé en février qu'il renonçait au journalisme après ces accusations. «Nous vivons désormais une époque de sommations. Si on n'est pas d'un côté, on est de l'autre», a-t-il écrit.

«Je vais donc m'occuper de littérature (...) j'arrête le journalisme sous peu». «Non pas abdiquer mais aller plus loin que le jeu de vagues et des médias».