Alain Gravel «n'est pas là pour planter personne». C'est ce que le nouveau morning man d'ICI-Radio-Canada Première répète à tous ceux qui lui demandent s'il entre en guerre contre le roi des ondes, Paul Arcand, qui trône au sommet des cotes d'écoute au 98,5 FM.

Mais en se faisant poser la question différemment lors du lancement de la nouvelle saison de la radio publique, hier, le sportif qui carbure à la compétition - il participera prochainement à un triathlon avec son fils - a laissé entrevoir les ambitions qu'il chérit pour sa nouvelle émission.

«D'abord, je ne suis pas Paul Arcand. Nous sommes complètement différents. Je le connais un peu, il me connaît un peu, et nous ne sommes pas le même monde. [Dans le marché de la radio], tout comme lorsque je fais du vélo, je veux toutefois être dans le peloton. Pas à la fin. Quand il y a une échappée, je veux être là. To be part of. Être dedans», a-t-il expliqué avec intensité.

L'image d'une échappée qui quitte un peloton de cyclistes représente bien les défis qui attendent la société d'État. Lors des derniers sondages Numeris, qui mesurent les parts de marché des stations de radio du Grand Montréal, Radio-Canada a perdu des plumes dans certaines cases horaires, dont celle de l'émission matinale.

René Homier-Roy, qui a longtemps animé C'est bien meilleur le matin, ne semble pas surpris de ces récents déboires. «Ils ont tenté de changer la formule de l'émission du matin et ce ne fut pas concluant. C'est [en partie] pourquoi je suis parti. Je me suis dit: «Je suis mieux de laisser les autres se casser la gueule», ce qui est arrivé», explique avec recul l'animateur de Culture club.

Maintenant qu'il ne se lève plus aux aurores, écoute-t-il ses successeurs?

«La première année [de Marie-France Bazzo], c'était difficile. Le choix n'était pas celui que j'aurais fait pour la suite des choses; le contenu non plus. Alain Gravel, je l'ai écouté ce matin. Tout le monde a tellement dit que ce serait épouvantable! Mais c'est nettement meilleur que je craignais! C'est un garçon intelligent, on va voir ce que ça va donner», a dit le vétéran de la radio.

Une radio «audacieuse», promet la direction

Radio-Canada est consciente des défis qu'elle doit relever. Patricia Pleszczynska, directrice générale d'ICI Radio-Canada Première, croit que la baisse des cotes d'écoute est en partie imputable aux nombreux changements d'animateurs qui se sont succédé ces derniers mois.

«Plusieurs animateurs de talent ont pris la relève sur nos ondes, mais ce genre de situation dérange les habitudes d'écoute. Un moment donné, les auditeurs veulent connaître les personnes qui entrent dans leur intimité», explique-t-elle.

Mme Pleszczynska fait confiance à sa nouvelle équipe, dont Annie Desrochers, qui est depuis hier à la barre de l'émission du retour, mais aussi Alain Gravel, qui ouvre la journée. «Alain ne se fera pas marcher sur les pieds. C'est ça que les gens veulent. Le matin, on n'a pas le temps de perdre son temps. Quand on pose une question, on veut une réponse», dit-elle.

Même si la radio publique n'a pas de visées commerciales, c'est-à-dire qu'elle ne vend pas de publicités pour financer ses activités, la directrice d'ICI Radio-Canada Première accorde une importance aux parts de marché qu'elle récolte.

«On ne fait pas un choix en fonction des cotes d'écoute, mais en fonction d'un auditoire qu'on doit atteindre. C'est important pour nous que nos émissions soient pertinentes. Les émissions ne peuvent pas être pertinentes si elles n'ont pas de cotes d'écoute. Et une radio publique doit nécessairement avoir un public, sinon elle devient élitiste, et ce n'est pas le choix que l'on fait», a expliqué Mme Pleszczynska.