Quelque 400 salariés du Monde se réunissent mercredi après-midi pour se prononcer pour ou contre la désignation de Jérôme Fenoglio, l'actuel numéro deux, au poste prestigieux de directeur du quotidien, une élection qui devrait tourner la page d'une période troublée pour le journal.

Sauf surprise, Jérôme Fenoglio, le candidat choisi par les actionnaires (Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse) devrait recueillir les 60% de suffrages nécessaires pour être désigné pour un mandat de six ans.

L'Assemblée générale de la Société des rédacteurs du Monde (SRM) devait s'ouvrir à 14h30 au siège parisien du Monde dans le XIIIe arrondissement de Paris, boulevard Auguste-Blanqui.

Les journalistes du quotidien doivent répondre à la question: «Approuvez-vous la nomination de Jérôme Fenoglio au poste de directeur du Monde

Le vote à bulletin secret est prévu mercredi en fin de journée et le résultat sera annoncé dans la foulée.

S'il est élu, Jérôme Fenoglio sera le sixième directeur du Monde depuis 2010, date d'arrivée de «BNP», le surnom donné au trio Bergé-Niel-Pigasse.

Le score de Jérôme Fenoglio, 48 ans, sera observé à la loupe afin de mesurer le niveau de mécontentement de la rédaction après un processus de sélection que certains jugent «tronqué».

Mi-avril, les actionnaires avaient créé la surprise en proposant aux salariés de confier la direction du quotidien à Jérôme Fenoglio, qui n'était pas candidat. De cette façon, ils écartaient les trois candidatures déclarées, dont celle de l'actuel directeur du journal par intérim Gilles van Kote, modifiant ainsi le processus de nomination.

Avant de procéder au vote, la rédaction sera appelée à se prononcer à main levée sur un texte pour «marquer (sa) désapprobation sur la manière dont les actionnaires se sont comportés», explique-t-on en interne.

À l'ouverture de l'assemblée générale, Jérôme Fenoglio, «pur produit» du journal où il a fait toute sa carrière, s'adressera une dernière fois aux journalistes et débattra avec eux de ses ambitions pour le quotidien.

- Miser sur «la stabilité»

Diplômé de l'École de journalisme de Lille, ce Toulonnais d'origine est entré au Monde en 1991, au service Sports. Passé par les services Société et Sciences, puis Le Monde 2, un temps grand reporter, il a dirigé le Monde.fr de 2011 à 2013, avant de devenir directeur des rédactions en mai 2014.

Dans son «projet pour Le Monde», envoyé lundi à tous les salariés, l'intéressé s'est engagé, s'il était élu, «à protéger la rédaction de toute intervention, de tout jeu d'influence».

Côté stratégie, l'actuel directeur des rédactions propose «d'amplifier le succès» du choix du «freemium», soit le mélange de services gratuits et payants.

Si le quotidien doit rester, dit-il, «encore longtemps la colonne vertébrale de nos offres payantes», le futur directeur entend développer les nouveaux supports, en mettant l'accent sur la vidéo et le mobile, alors que Le Monde vient de lancer une édition numérique matinale pour les smartphones.

Le prochain patron du quotidien, qui compte nommer Luc Bronner à la tête des rédactions, mise aussi sur «la stabilité» afin de sortir de «cette période troublée», a-t-il écrit. Une référence au long conflit qui avait secoué le journal début 2014 avant de se solder par la démission de la directrice, Natalie Nougayrède.

Un an plus tôt, cette dernière avait pourtant été adoubée avec 79,4% des suffrages exprimés, très au-dessus des 60% requis.

Le Monde, qui a vendu en mars 280 556 exemplaires (papier ou internet) par jour en moyenne, voit ses chiffres de diffusion globaux baisser (-6000 sur un an), la hausse des exemplaires numériques (+30% entre mars 2014 et mars 2015) ne compensant pas la chute des ventes papier.

Le groupe Le Monde, qui édite notamment le quotidien éponyme, les hebdomadaires Télérama et Courrier international et le mensuel Le Monde diplomatique, vise désormais un résultat net 2015 «positif», sans fournir de chiffres précis, après une perte nette de 0,5 million d'euros en 2014.

À l'horizon 2017, le futur siège du groupe Le Monde, dans le sud de Paris, doit permettre de faire travailler ensemble les 1400 collaborateurs des différentes publications.