Le New York Times a annoncé lundi qu'il allait changer le nom de son édition internationale, l'International Herald Tribune, pour y apposer sa propre marque, avec l'espoir d'élargir ainsi son lectorat en dehors des États-Unis.

Le quotidien international, passé à la postérité grâce au film de Jean-Luc Godard À bout de souffle (1959), où le personnage joué par Jean Seberg le vendait à la criée, sera rebaptisé International New York Times «plus tard cette année», selon un communiqué. Il sera édité depuis Hong Kong, Paris, Londres et New York.

Le changement de nom ira avec un développement des services internet et mobiles, pour obtenir «une version internationale multi-plateformes du New York Times qui sera conçue et éditée spécifiquement pour le public mondial», selon le groupe, qui promet des détail «dans les prochains mois».

L'IHT partage actuellement ses correspondants avec ceux du New York Times, avec un effectif cumulé de 1100 personnes (journalistes, photographes, éditeurs, etc).

Une porte-parole de l'IHT a assuré qu'il n'y avait pas de plan pour réduire les équipes, mais plutôt «un engagement pour investir dans des ressources éditoriales en Europe et en Asie».

Le journal, qui a fêté son 125e anniversaire l'an dernier, est distribué en version papier dans plus de 160 pays et revendique «des millions» de lecteurs pour ses éditions numériques.

Il a été publié pour la première fois en octobre 1887 sous le titre Paris Herald, en tant qu'édition européenne du New York Herald. Après la fermeture de ce dernier en 1966, le New York Times et le Washington Post entrent au capital, et le journal prend son nom actuel en 1967.

Le New York Times et le Washington Post se retrouveront seuls actionnaires, à 50-50, à partir de 1991, le premier finissant par racheter les parts du second en 2003.

«Étendre notre base mondiale»

«Je suis désolé de voir le Herald Tribune s'en aller», mais «après que le Times a poussé le Washington Post dehors, c'était probablement inévitable», a commenté Charles Robertson, professeur au Smith College de Northampton au Massachusetts et auteur d'un livre sur l'histoire de l'IHT, qu'il lit depuis son enfance en Suisse.

Joscelyn Mackay, analyste du cabinet de recherche Morningstar, voit aussi dans le changement de nom «une continuation de la stratégie actuelle» du groupe de presse, qui «concentre son attention et sa stratégie sur la forte marque New York Times».

Il vient ainsi d'annoncer la mise en vente de plusieurs titres dont le Boston Globe.

Mark Thompson, directeur général du groupe, a dit lundi vouloir «investir davantage dans notre journalisme international et étendre notre base mondiale».

«Il y a un potentiel important pour augmenter le nombre d'abonnés au New York Times en dehors des États-Unis», et attirer aussi «des abonnements numériques et des annonceurs», a-t-il jugé.

C'est «faisable», selon Mme Makay. «Le New York Times est un journal national très solide aux États-Unis», avec «des lecteurs très fidèles», souligne-t-elle. «Le contenu lui-même va devoir devenir un peu plus mondial, ils devraient avoir à faire des investissements dans leurs effectifs et s'assurer d'avoir une présence partout.»

Toutefois l'effet à long terme «reste à voir, étant donné les difficultés auxquelles sont confrontés les médias imprimés», prévient l'analyste.

Face à la concurrence d'internet et au marché publicitaire morose, le groupe a supprimé des emplois et développé ses services payants sur la toile, où le New York Times comme l'IHT ne permettent l'accès à la totalité de leurs contenus que sur abonnement.

La progression des abonnements numériques a contribué à son retour aux bénéfices l'an dernier, M. Thompson se félicitant même d'avoir, pour la première fois dans l'histoire du groupe, gagné plus d'argent grâce à ses lecteurs qu'avec ses annonceurs.