L'avenir des médias est dans l'hyper-local, répète-t-on. Même Arianna Huffington, la gourou américaine propriétaire du Huffington Post, le pense. Si c'est vrai, alors CIBL est à l'avant-garde. Car le 101,5 FM, qui a célébré ses 30 ans l'an dernier (et qui vient de lancer un livre racontant son histoire) est hyper-local depuis trois décennies.

Implantée dans son milieu (le quartier Hochelaga-Maisonneuve, où elle offre des ateliers de radio aux élèves de l'école Eulalie-Durocher), la station qui se surnomme Radio-Montréal est une véritable radio citoyenne, terme galvaudé s'il en est un. Proche des gens, couvrant de près la politique municipale et la culture montréalaise bien avant que les grands médias ne s'y intéressent, CIBL a également donné la parole aux groupes communautaires qui n'avaient pas de visibilité ailleurs.

Au fil des ans, CIBL (tout comme CISM, la radio de l'Université de Montréal) a également été un formidable incubateur de talents. Plusieurs noms du monde des médias ont fait leurs premières armes dans ses studios insonorisés avec des boîtes d'oeuf en carton, émettant leurs premiers propos radiophoniques dans un micro qui tenait parfois par la peur. De Rock et Belles Oreilles à Jean-René Dufort en passant par Monique Giroux, Catherine Pogonat et l'illustre collègue Marc-André Lussier, qui a tenu une émission de cinéma fort appréciée (Projection spéciale) durant huit ans, tous y ont fait leurs premiers pas à une époque où les portes des institutions comme Radio-Canada étaient fermées hermétiquement aux jeunes et aux voix marginales.

Avec peu de moyens techniques, sans salaire, carburant à la passion, les différentes générations d'animateurs et de producteurs ont porté à bout de bras cette radio à la santé financière fragile, survivant au rythme des radiothons et des collectes de fonds.

 

CIBL se prépare à vivre un grand déracinement. La radio s'apprête à déménager dans les nouveaux locaux du 2-22, à l'intersection de la rue Sainte-Catherine et du boulevard Saint-Laurent, en plein coeur du Quartier des spectacles (le déménagement doit avoir lieu autour du 5 novembre et l'ouverture officielle, le 25 novembre).

Quel effet aura cette transplantation sur le son et le contenu de CIBL? On le verra à ce moment-là, mais il est clair que le contexte a bien changé au cours des dernières années. Aujourd'hui, la voix citoyenne a l'embarras du choix pour s'exprimer, que ce soit dans les blogues, les webradios ou les médias sociaux. L'avant-garde musicale et culturelle aussi jouit de plusieurs plateformes qui n'existaient pas il y a 20 ans. CIBL devra donc redéfinir sa pertinence dans ce nouvel environnement.

30 ans de radio citoyenne

Chloé Sondervorst avec Robert Blondin, Richard Vézina éditeur, 215 p.

30 ans de radio citoyenne, le livre signé Chloé Sondervorst et Robert Blondin.