Jean-Philippe Wauthier est peut-être le premier animateur de l'histoire des médias à avoir décroché un emploi grâce à Twitter. En effet, après avoir appris en lisant le journal que Marie-France Bazzo allait produire un quizz sur l'actualité l'an prochain, le coanimateur du Sportnographe lui a posé quelques questions en direct sur le site de microblogage. Après quelques échanges, l'animatrice-productrice lui écrivait un message privé pour lui demander s'il avait envie de tenter sa chance. Et c'est ainsi que le Chicoutimien Jean-Philippe Wauthier s'est retrouvé à «auditionner» pour le poste d'animateur de La une qui tue!, qui doit prendre l'antenne à l'automne sur les ondes de Télé-Québec.

«Je ne suis pas Sébastien Benoît, il ne faut pas s'attendre à un quizz traditionnel», assure le futur animateur rencontré la semaine dernière en compagnie de Gaston, un charmant carlin qui possède son propre compte Twitter (!). «Il va y avoir un côté critique puisqu'il s'agit d'une revue de l'actualité de la semaine, ajoute celui qui a déjà fait la revue de presse quotidienne à l'émission du matin de RDI. J'aimerais également écrire un monologue d'ouverture et avoir du temps dans l'émission pour niaiser les gens. Il y aura de l'humour, c'est certain.»

Que les fans du Sportnographe se rassurent, l'émission satirique qui se moque des médias sportifs revient sur les ondes de la Première chaîne l'an prochain. L'émission qu'il a conçue avec ses deux complices, Jean-Philippe Pleau et Olivier Niquet - et qui mérite une nomination au gala des Olivier chaque année dans la catégorie meilleure émission humoristique - prendra toutefois une tournure différente. «On en a tous notre casque du sport, lance Jean-Philippe Wauthier. Moi, je n'écoute même plus le Canadien. Ces temps-ci, on regarde du côté des médias comme CHOI (Radio X) ou le FM93 à Québec, ou encore Sun TV News. On trouve ça fascinant de les écouter et il nous semble qu'il y a un discours là qu'il faut critiquer. On n'invente rien, on sait bien que Stephen Colbert et Jon Stewart le font aux États-Unis, mais cela n'empêche pas qu'il y ait des choses à dire ici aussi.»

«Super drôle à analyser»

Il cite en exemple l'émission radiophonique animée par Dominic Maurais, Maurais Live, à Québec, qui a lancé cette année un concours «Let's honk a cyclist» afin que ses auditeurs klaxonnent les cyclistes sur la route (et dont a parlé le Sportnographe récemment). Ou encore les nombreux commentaires entendus sur les ondes des radios de Québec durant le débat entourant le projet d'amphithéâtre.

«Il y a à Québec un discours de droite qui ne se rend pas à Montréal et qui est super drôle à analyser, souligne Jean-Philippe Wauthier, et c'est ce qu'on aimerait faire dans un genre de bulletin d'information à la fois humoristique et critique. C'est l'fun d'être baveux et on a envie d'aller ailleurs», ajoute-t-il, précisant, sourire en coin, qu'au moment de notre rencontre, aucun des trois artisans du Sportnographe n'avait signé un contrat pour la prochaine saison.

Quand on fait partie d'une équipe tricotée aussi serrée que celle du Sportnographe, un contrat solo d'animation télé provoque-t-il une onde de choc au sein de l'équipe? «Je ne pense pas, avance Jean-Philippe Wauthier. Je suis certain qu'Olivier va écrire ailleurs. Quant à Jean-Philippe Pleau, il réalise et anime une émission de radio pendant l'été avec Serge Bouchard sur la Première chaîne. L'an prochain, on aura un peu plus de temps pour des projets extérieurs, on ne sera pas pris à temps plein dans la réalisation du Sportno, car on aura une journée de libre chaque semaine, ce qui nous permettra de développer d'autres projets. Au final, La une qui tue! va donner une bonne visibilité à l'émission de radio. Le seul petit problème, c'est qu'il se peut que les deux émissions soient diffusées le vendredi soir.»

Un Daily Show québécois?

Le rêve ultime du trio de choc demeure toutefois celui d'animer une émission de télévision inspirée du Daily Show de Jon Stewart. «C'est un rêve, mais honnêtement, je ne pense pas qu'une telle émission soit possible au Québec, reconnaît Jean-Philippe Wauthier. Pas sur une base quotidienne en tout cas. Une émission comme Colbert Report, par exemple, peut compter sur une équipe de 13 à 15 scripteurs pour 22 minutes d'émission. C'est inimaginable ici, mais on aimerait tellement ça.»

Jean-Philippe Wauthier trouve bien frileuse la programmation télévisuelle actuelle. «À l'exception de V qui essaie des choses, ou de Jean-René Dufort qui fait des choses que personne ne fait avec Infoman, on ne peut pas dire que les chaînes télé prennent beaucoup de risques ces temps-ci, il n'y a pas beaucoup de contenu baveux, irrévérencieux. Je dirais qu'on risque un peu plus à Télé-Québec et avec la gang de Marie-France Bazzo.»

D'ici à ce qu'il se drape dans ses habits d'animateur de quizz, Jean-Philippe Wauthier livrera quelques billets de son cru à l'émission estivale Sans préliminaires, animée par Franco Nuovo sur la Première chaîne. «C'est en quelque sorte une suite de ce que j'ai entrepris à l'émission Je l'ai vu à la radio pendant l'année, note Wauthier. Franco m'a demandé de préparer un billet pour l'émission spéciale de la rentrée d'été et j'ai vraiment eu beaucoup de plaisir à le faire. J'espère que je pourrai continuer sur le même ton (grinçant et baveux) cet été.»

Les sources de Jean-Philippe Wauthier

À la télévision, Jean-Philippe Wauthier regarde The Daily Show et Colbert Report. Mais le coanimateur du Sportnographe est avant tout un gars de radio, qu'il consomme en connaisseur. Parmi ses émissions préférées, This American Life, offerte en baladodiffusion (thisamericanlife.org). Il écoute également 2000 ans d'histoire, émission consacrée à l'histoire, offerte sur le site de France Inter (Jean-Philippe Wauthier a d'ailleurs travaillé à un concept d'émission sur l'histoire destinée à la Première chaîne. Toujours en balado, il écoute Stuff You Should Know, une émission scientifique produite par Discovery, On the Media (onthemedia.org), produit par NPR, The Culture Gapfest sur le site de Slate, ainsi que l'émission Babylone, série de grands entretiens diffusés sur Espace 2, la chaîne culturelle de la Radio Suisse romande. Il est tellement accro aux balados qu'il préfère même «écouter» de cette façon certaines émissions de télévision comme 60 minutes ou encore Bazzo.tv. «Je n'ai jamais regardé cette émission, dit-il, je l'ai toujours écoutée.»

> Pour suivre Jean-Philippe Wauthier sur Twitter: @jpwauthier

> Pour suivre son chien Gaston: @gastonwauthier