La planète entière s'apprête à passer en mode soccer. En d'autres temps, la diffusion des 64 matchs en direct de l'Afrique du Sud aurait représenté un eldorado publicitaire pour les chaînes de télévision qui détiennent les droits de la FIFA. Mais voilà, le contexte économique actuel est encore fragile et pour des réseaux comme Radio-Canada, le gain se traduira surtout en visibilité et en notoriété.

Le coût des droits de diffusion de la Coupe du monde varie selon les pays et l'intérêt qu'on porte au ballon rond. Aux États-Unis, le réseau ABC a payé 100 millions US pour diffuser les Coupes de 2010 et 2014 alors qu'en France, où la population est moins nombreuse, mais où le foot est pratiquement une religion, TF1 a déboursé 152 millions US. À Radio-Canada, on assure que la somme correspond à la capacité de payer de la société d'État.

Il faut dire que les droits de diffusion de la Coupe du monde sont beaucoup moins élevés que ceux des Jeux olympiques (NBC avait déboursé 2,2 milliards pour obtenir les droits des Jeux de 2010 et 2012). Selon la firme de recherche Sportcal, citée dans le New York Times, les droits de diffusion mondiaux de la Coupe du monde auraient généré des revenus de 2,15 milliards pour la FIFA.

En France, où les auditoires seront probablement astronomiques, TF1 a donc payé autour de 152 millions US pour retransmettre 64 matchs. La chaîne, éprouvée par la crise et son impact sur les revenus publicitaires, a toutefois cédé la diffusion de huit matchs à la chaîne câblée (et donc payante), Canal Plus.

Aux États-Unis, le réseau ABC diffusera 10 matchs et la chaîne sportive ESPN, 44. La retransmission des 10 autres matchs sera assurée par une chaîne hispanophone. Au Canada, la folie du foot est beaucoup moins intense et cela se reflète, nous dit-on à la société d'État, dans le coût des droits de diffusion, moins élevés qu'en Europe et aux États-Unis.

Moins complexe que les Jeux

La porte-parole, Nathalie Moreau, affirme que Radio-Canada n'aurait pas soumissionné si le coût des droits avait été démesuré. «De plus, explique-t-elle, c'est un événement beaucoup moins complexe à produire que les Jeux olympiques, car il n'y a pas d'épreuves qui se déroulent simultanément. Enfin, l'heure des matchs fait en sorte que cela ne vient pas trop bouleverser notre grille horaire.»

Outre les revenus publicitaires, quel est l'intérêt, pour un diffuseur, de présenter la Coupe du monde? «D'abord, la Coupe du monde va positionner Radio-Canada dans le monde du sport, observe Alain Tardy, vice-président médias chez Marketel. À l'heure actuelle, presque tout se passe à RDS. En diffusant les matchs de l'Impact et la Coupe du monde, Radio-Canada devient le spécialiste du soccer.»

«Ensuite, il y a l'aspect marketing, poursuit M. Tardy. La Coupe du monde pourrait devenir un événement de grande envergure au même titre que les finales du hockey avec le Canadien. C'est l'élément inconnu de l'équation. Si c'est le cas, les gens vont se rassembler autour de leur téléviseur et regarder Radio-Canada.»

Une finale Brésil-Espagne, par exemple, pourrait faire grimper l'intérêt des Montréalais de plusieurs crans et se traduire par des auditoires records pour la société d'État.

À plus long terme, on devine que Radio-Canada mise aussi sur ce rendez-vous sportif pour courtiser les membres des communautés culturelles de la métropole, qui seront sans doute scotchés à leur petit écran au cours du prochain mois. Qui sait, un certain nombre d'entre eux découvriront peut-être Radio-Canada et auront envie d'y revenir? Sans compter tous ceux qui, intéressés à découvrir l'Afrique du Sud, seront attirés par la programmation périphérique (reportages, émissions spéciales, capsules, contenus web). Le jeu en vaut-il la chandelle? Réponse dans un mois.