L'écrivain britannique Salman Rushdie a affirmé mercredi qu'il ne regrettait pas d'avoir écrit les Versets sataniques, 20 ans après la sortie de ce livre qui lui a valu une fatwa iranienne et de longues années dans la clandestinité.

Lors d'un entretien avec le journaliste australien James Clive, diffusé sur le site du Times, l'auteur d'origine indienne explique qu'il regretterait au contraire de ne pas avoir écrit un livre s'attaquant à des questions religieuses ou philosophiques majeures.

«La question que je me pose tout le temps est la suivante : Sommes-nous maîtres ou victimes? Faisons-nous l'histoire ou est-ce que c'est l'histoire qui nous fait? Est-ce qu'on façonne le monde ou est-ce qu'on est façonné par lui?», s'interroge-t-il.

«La question de savoir si nous avons prise sur nos vies ou si nous sommes simplement des victimes passives des événements est, à mon avis, une grande question, que j'ai toujours essayé de poser», poursuit-il.

«Dans ce sens, je n'aurais pas voulu ne pas être l'écrivain qui l'a posée», notamment dans les Versets sataniques, ajoute l'auteur, dans ce style parfois alambiqué dont il est coutumier.

Ces déclarations sont publiées quelques jours après l'arrestation à Londres de trois hommes soupçonnés d'être impliqués dans un début d'incendie survenu chez l'éditeur londonien d'un livre controversé sur la plus jeune épouse du prophète Mahomet.

La publication des Versets sataniques, livre jugé blasphématoire contre l'islam, avait provoqué un tollé dans le monde musulman. L'imam Khomeiny, guide suprême de la révolution islamique iranienne, avait prononcé une fatwa le 14 février 1989, obligeant Salman Rushdie à vivre caché, sous protection policière, pendant près d'une décennie.

Le gouvernement iranien avait indiqué en 1998 qu'il ne tenterait pas de faire appliquer le décret de l'ayatollah Khomeiny, ce qui avait mis fin à la clandestinité dans laquelle vivait l'écrivain. Mais son anoblissement par la reine Elizabeth II en 2007 avait relancé la polémique, faisant dire à un religieux iranien que la fatwa était toujours valable.