L'écrivain français Jean-Marie Gustave Le Clézio a fait l'apologie de la littérature universelle, tout en s'interrogeant sur le rôle paradoxal de la création littéraire, dans le discours de réception du Nobel de littérature qu'il a prononcé samedi à Stockholm.

«Aujourd'hui, au lendemain de la décolonisation, la littérature est un des moyens pour les hommes et les femmes de notre temps, d'exprimer leur identité, de revendiquer leur droit à la parole et d'être entendus dans leur diversité», estime le romancier. «La culture à l'échelle mondiale est notre affaire à tous», ajoute-t-il en soulignant que le livre, malgré son prix élevé dans les pays pauvres, reste le meilleur vecteur pour accéder à la culture, comparé à l'internet ou au cinéma.

«Le livre est, dans tout son archaïsme, l'outil idéal. Il est pratique, maniable, économique», dit encore le Nobel 2008.

Dans son discours intitulé «Dans la forêt des paradoxes» et prononcé en français dans la salle de réception de l'Académie suédoise, Le Clézio a alterné les souvenirs personnels sur sa découverte de la lecture après la Seconde guerre mondiale et les interrogations sur la création littéraire.

La «forêt des paraxodes» - titre emprunté à l'écrivain suédois Stig Dagerman - évoque à la fois l'opposition entre une littérature qui se veut pour tous et qui reste réservée à une minorité, mais aussi celle de l'écrivain, être solitaire qui veut parler pour l'humanité.

«Agir c'est ce que l'écrivain voudrait par-dessus tout. Agir plutôt que témoigner. Ecrire, imaginer, rêver, pour que ses mots, ses inventions et ses rêves interviennent dans la réalité, changent les esprits et les coeurs, ouvrent un monde meilleur».

Mais l'écrivain sait que «les mots sont des mots que le vent de la société emporte, que les rêves ne sont que des chimères».

Pourtant Le Clézio, 68 ans, rejette une vision pessimiste. La littérature, dit-il, «est une voie complexe, difficile, mais je crois encore plus nécessaire aujourd'hui qu'au temps de Byron ou de Victor Hugo».