Véronique Olmi a une carrière bien remplie. Huit romans traduits dans une quinzaine de langues, autant de pièces de théâtre, quelques nouvelles et essais. Son plus récent roman, Nous étions faits pour être heureux, l'a amenée au Québec pour la première fois à l'occasion du Salon du livre de Montréal.

La romancière scrute les blessures de l'enfance, les culpabilités refoulées et les secrets qui teintent l'identité. «Les êtres sont beaucoup plus complexes que ce qu'ils laissent voir. Sous le vernis des apparences, les meurtrissures du passé sont inscrites en nous. Tout comme les événements et les rencontres. Les gens ne sortent pas de nos vies. On ne peut pas les effacer. Ils font partie de notre histoire», dit-elle.

Codes esthétiques

Serge, 60 ans, a tout pour être heureux. Il est financièrement à l'aise, sa femme, Lucie, est jeune et aimante, et ils ont deux beaux enfants. Il s'étonne d'être attiré par Suzanne, qui n'est ni jeune, ni belle, ni raffinée.

«Je voulais démontrer que l'attirance n'a rien à voir avec les codes esthétiques. Ce qu'on appelle coup de foudre est en fait un éclat de lumière projeté sur une personne que l'on reconnaît de l'intérieur», dit l'auteure.

Serge envie la liberté qu'il perçoit chez Suzanne. D'instinct, il sait qu'elle a l'ouverture et la force pour entendre ce lourd secret d'enfance qu'il n'a jamais révélé. «Certains m'ont reproché de faire l'apologie de l'adultère. C'est faux. J'ai trop souffert de l'adultère pour en faire l'apologie», dit-elle pour sa défense.

Suzanne

Véronique Olmi a créé un personnage prénommé Suzanne dans au moins trois romans. «Je crois qu'inconsciemment, j'ai été influencé par la chanson de Leonard Cohen. Pour moi, ce prénom correspond à une personne saine, solidement ancrée dans la réalité et qui s'assume pleinement.»

Grâce à Suzanne, Serge trouve le courage de défier ses peurs et d'affronter son père. La rencontre est décevante, mais elle lui permet tout de même de se réconcilier avec le petit garçon qu'il était. «Il n'y a pas toujours de réponses aux questions qu'on se pose. Mais les formuler permet d'aller de l'avant», analyse Véronique Olmi.

Elle dit avoir aussi beaucoup de tendresse pour Lucie. «En écrivant, j'ai vu apparaître une belle personne, une grande amoureuse, une femme faite pour le bonheur. Ce n'est pas une victime; elle est sans méchanceté et sans aigreur.»

L'écriture de Nous étions faits pour être heureux est d'une telle précision que le récit se déroule comme un film. Le lecteur a l'impression de circuler dans différents quartiers de Paris. «J'écris à partir d'images, explique l'auteure qui a fait un repérage minutieux. «Toutes les adresses sont réelles. Je me suis longtemps promenée dans Paris pour trouver la maison de Serge. Je suis allée dans l'immeuble de Suzanne. La couleur de la moquette, l'escalier, etc.; tout est rigoureusement exact», dit Véronique Olmi, reconnaissant du même souffle que l'association de personnages fictifs à des lieux réels est «assez troublante».

Cinéma

Trois de ses romans (Cet été-là, Le premier amour et Bord de mer) ont été pressentis pour devenir des films. «Ça ne s'est pas matérialisé. Probablement parce que la fin de mes livres est toujours ouverte, ce qui n'est pas idéal au cinéma. Mais dans la vie, on ne sait jamais ce qui va se passer.»

Les pièces de théâtre de Véronique Olmi reprennent régulièrement l'affiche en France et dans d'autres pays. Elle a aussi fondé le festival de théâtre Le Paris des femmes, dont elle assure fièrement la direction artistique.

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Nous étions faits pour être heureux, de Véronique Olmi. Albin Michel, 230 pages

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