À 26 ans, en 2002, Maxime Chattam a publié son premier roman. Le succès de cette brique de 500 pages, directement branchée sur les séries policières «scientifiques» américaines, en a surpris plus d'un et a lancé une carrière époustouflante.

Une carrière époustouflante... et prolifique. Avec la sortie l'an dernier de son roman policier Le requiem des abysses - au printemps - et du roman fantastique Entropia juste avant Noël, Maxime Chattam a maintenant 15 titres derrière la cravate. Sa méthode - trois mois de préparation et de documentation, puis 1200 heures d'écriture - signifie qu'il atteindra le chiffre de 16 avant 2013.

«J'ai fait des romans réalistes, des thrillers, depuis le début», explique-t-il, en entrevue joint en banlieue de Paris pour parler d'Entropia, quatrième tome de la série Autre-Monde, paru au Québec au début de 2012. «J'avais envie de m'amuser, de revenir à mes premières amours, la littérature plus fantastique. De me fier non pas à de la documentation, mais à mon imagination seulement.»

Autre-Monde, inspirée du Paradis perdu de John Milton et de Sa Majesté des mouches de William Golding, suit trois adolescents dans une Amérique postapocalyptique - après un dérèglement climatique aux accents magiques qui a notamment fait disparaître la plupart des adultes et des armes à feu. Le quatrième tome de la série, qui doit en compter sept, se passe en partie au Québec, notamment au Château Frontenac.

«Le thème principal est le point de bascule vers l'âge adulte, dit M. Chattam. J'étudie les différents leviers de la bascule. C'est un roman initiatique au sein d'une épopée chevaleresque, une grande aventure à la Tolkien, sans chercher à me comparer. J'aime ce moment dans la vie où on doit faire le deuil de l'adolescence. En fait on ne le fait jamais. On ne se lasse jamais de l'époque de l'insouciance, qui cristallise certaines des forces qui donnent son énergie au romancier. Pour étudier le monde, il n'y a pas mieux qu'un regard d'adolescent.»

Au départ, Autre-Monde devait viser un public adolescent. «Mais finalement, tout doucement, j'ai raconté l'histoire dont j'avais envie. Dès la fin du tome un sont apparus des sujets plus adultes, même un peu noirs. La volonté d'écrire pour les jeunes adolescents est disparue.»

Que pense-t-il du foisonnement de romans pour adolescents, particulièrement de romans fantastiques, avec le nouveau millénaire? «Il y a en effet une effervescence que je ne voyais pas quand j'étais jeune. Je pense que c'est très bien. Certains craignent que ça va éloigner les jeunes des classiques, Jules Verne, Mark Twain. Mais l'école est là pour ça, pour obliger à lire des classiques. Le reste du temps, l'adolescent a le libre choix et s'il décide de lire, c'est tant mieux. Il ne faut pas oublier non plus que Verne et Twain écrivaient au départ pour des adultes, c'est plus tard qu'on a défini leur oeuvre différemment.»

C'est justement à l'adolescence que Maxime Chattam a connu la culture américaine qui lui donne son souffle si particulier. Des parents vivant en Oregon l'invitent à y passer ses étés à partir de l'âge de 11 ans. Il rejette les prétentions de la «littérature avec un grand L» et se réclame volontiers de Stephen King et du film mélodramatique Titanic.

Son goût pour les livres lui vient de sa mère. «Elle est une grande lectrice, nous avions des centaines sinon des milliers de livres, des bibliothèques dans les couloirs.» Son père est pupitreur dans des journaux parisiens, sa mère butine d'un métier à l'autre - secrétaire, préposée dans une maison de retraite - et ses frères et soeurs ont choisi des domaines tout sauf littéraires. Lui-même a commencé sa vie comme comédien, puis a écrit une pièce de théâtre qu'il n'a pas publiée, avant de s'inscrire comme auditeur libre à des cours de médecine légale près de chez lui, à Saint-Denis - il a vécu toute sa vie dans le Val-d'Oise, à une trentaine de kilomètres de Paris.

Et Montréal? «J'étais tombé amoureux de la ville et des Québécois il y a huit ans, dit Maxime Chattam. J'y suis retourné plusieurs fois et je me suis mis en tête de venir m'y installer. J'ai commencé les démarches et pendant près d'un an j'ai eu très envie de m'installer à Outremont ou dans le Plateau. Mais finalement, avec le travail, tout ça est devenu plus difficile à réaliser.»

Tirant profit de sa connaissance du Québec, il y situe une partie d'Entropia et de son prochain roman policier - il passe d'un genre à l'autre en alternance, «pour s'amuser». Quand Maxime Chattam s'amuse, les libraires vendent.