Le Festival international de la littérature présente Chantier des extases , une mise en lecture de la poésie de Marie Chouinard accompagnée par Rober Racine. Marie Chouinard lira sa poésie entrecoupée des improvisations de Rober Racine au piano. Une façon pour eux de souligner une complicité artistique de 30 ans, toujours en chantier.

«Je veux rester debout. C'est la danseuse qui se fait photographier au sol et là, je suis écrivaine.» Par ses mots, par sa position debout, Marie Chouinard marque immédiatement la différence. Sur la scène de la Cinquième Salle, jeudi, elle sera debout et lira son recueil de poésie, Chantier des extases, paru au printemps dernier aux éditions du Passage. Derrière elle, un échafaudage, un décor sobre pour rappeler le titre du livre. À ses côtés, Rober Racine, assis derrière un piano à queue. Quelques lumières, minimales, orchestrées par Caroline Nadeau. Et une vidéo circulaire, Kujukurihama 2, présentée en première mondiale, qui offre un paysage panoramique à 360 degrés d'Une plage du Japon, signée Luc Courchesne, directeur du département de design à l'Université de Montréal, et collaborateur de longue date de Chouinard.

 

Place donc au texte, d'une crudité organique, délibérément sexuelle, dans lequel existe aussi une dimension cosmique, ouvertement mystique, un appel au plus grand que soi. La poésie de Marie Chouinard, prend sa source dans les sensations charnelles, un peu comme si la pulsation de l'univers battait au coeur de la chair: dans la nuit/sa vulve pulse/ce n'est pas qu'elle désire un homme/elle garde battant/le pouls du monde. Elle y transmet une vision du monde, toujours la même, que l'on retrouve dans ses chorégraphies, dans ses films mais aussi dans sa manière si particulière de photographier. Qu'elle l'exprime par les mots, par la danse ou par les images, c'est l'univers Chouinard. «Je suis toujours moi, assure-t-elle, exactement la même dans tout ce que je crée, et je suis exactement telle que j'étais à 8 ans.»

Quatre ans de travail tout de même, pour ciseler la matière littéraire jaillie d'elle en quelques mois et qu'il a fallu ensuite épurer: choisir les mots, affermir le ton. Elle a voulu la forme littéraire brute, directe, et elle l'est. Réussir ce livre constituait une aventure déjà assez forte en soi, mais elle n'aurait jamais imaginé aller plus loin: «C'est Michelle Corbeil (directrice du FIL) qui, venue au lancement de mon livre à la fin avril, a spontanément eu cette idée, raconte-t-elle. Elle a adoré la courte lecture que j'en ai faite, et nous a immédiatement proposé de créer ce spectacle. Sans elle, ça ne se serait jamais fait!»

Rober Racine, écrivain, peintre, musicien, et avant tout ici ami de Marie Chouinard depuis 30 ans, a lui aussi accepté d'embarquer dans l'aventure, spontanément: «Je n'ai jamais fait ça, dit-il, et si ce n'était pour Marie, je ne le ferais pas. Je n'ai rien composé, je vais simplement improviser entre chaque lecture. Nous avons travaillé la structure, le timing - pas plus de 50 minutes -, le rythme global pour être prêts, mais après, je ne sais pas, on va se lancer, c'est un grand risque que nous prenons là.»

Le spectacle se veut donc d'abord un partage avec le public, une expérience littéraire, visuelle, sensuelle et musicale inédite. Mais un partage qui repose d'abord d'une mutuelle fidélité amicale et artistique: «Rober avait composé la musique de ma toute première pièce, Cristallisation, en 1978; lorsque j'ai fini mon livre, il en a été le premier lecteur; et maintenant il est là, sur scène avec moi, pour cette toute première lecture publique.» Alors, s'ils ont «un trac fou», la complicité et l'authenticité qui manifestement les lient depuis longtemps, autant que la force des textes de Marie Chouinard, laisse présager le meilleur.

Marie Chouinard et Rober Racine, Chantier des extases, dans le cadre du FIL, le 25 septembre à 20h30, à la Cinquième Salle de la PDA.