Voici un roman qui débute lentement, prend de la vigueur avec une intéressante réflexion sur la figure de Judas dans le Nouveau Testament et une autre sur les débats politiques animés ayant précédé la création d'Israël, en 1948.

Mais la narration s'essouffle, erre dans une romance floue et nous laisse finalement sur notre faim.

L'histoire se déroule en 1959 à Jérusalem. Shmuel interrompt ses études universitaires pour travailler au service d'un vieil intellectuel avec lequel il a des discussions animées, notamment sur Judas qui fascine Shmuel. L'étudiant considère que l'apôtre n'est pas un traître, mais le véritable père du christianisme puisque, sans lui, il n'y aurait pas eu de crucifixion. Et sans crucifixion, pas de christianisme !

Les lecteurs passionnés d'histoire des religions trouveront donc sans doute leur compte dans ce roman. Mais ce n'est pas suffisant, même si l'on comprend que l'idée sous-jacente d'Amos Oz est de condamner les fanatismes et de promouvoir la paix. Shmuel accuse d'ailleurs Ben Gourion d'avoir bâti Israël sur le principe de l'usage de la force plutôt que sur le sens communautaire.

Cofondateur en 1978 du mouvement La paix maintenant, Amos Oz rêve toujours d'un compromis entre Israéliens et Palestiniens...

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Judas 

Amos Oz

Gallimard

352 pages

Extrait

«Ben Gourion a peut-être été dans sa jeunesse un leader ouvrier, une sorte de tribun populaire, lança Shmuel en se rendant à la cuisine pour mettre la bouilloire sur le feu. Mais aujourd'hui, il dirige un État triomphaliste et nationaliste, et il n'a à la bouche qu'une phraséologie biblique oiseuse sur le retour du temps jadis et la réalisation des prophéties. Sans la paix, les Arabes finiront par l'emporter un jour ou l'autre, ajouta-t-il tout en s'activant dans la cuisine. C'est une question de temps et de patience. Du temps, les Arabes en ont à revendre et leur patience est infinie. Ils ne nous pardonneront jamais l'humiliation que nous leur avons infligée en 1948, ni le complot ourdi contre eux avec la Grande-Bretagne et la France il y a trois ans.»