Ce recueil de nouvelles publié en octobre fait partie des 12 oeuvres présélectionnées pour le Prix des libraires. Éric Ilhareguy, dont c'est le premier livre, est aussi artiste visuel et on sent souvent la touche de l'esthète dans cette oeuvre dense et insaisissable.

L'auteur, qui a aussi étudié en philosophie, possède un sens de l'image complexe et élaborée, un rapport aux objets, à la bouffe aussi, qui rend ce livre très charnel. Surtout, Moussaka est peuplé de personnages plus ou moins sympathiques qui ont de la difficulté à entrer en contact «normalement» avec leurs semblables.

Parfois réalistes, mais allant aussi souvent dans le sens du conte, les 11 nouvelles de Moussaka nous laissent une impression d'étrangeté. Comme si on était entré dans un univers parallèle où personne n'est réellement ce qu'il prétend être, et où on pénètre malgré nous dans les pensées profondes de nos voisins, amis, collègues de bureau ou colocataires - et ce n'est pas toujours sain...

On referme ce livre parfois déroutant avec l'impression que les gens qui nous entourent sont beaucoup moins équilibrés qu'ils n'en ont l'air. Mais surtout avec la certitude d'être en présence d'un nouvel auteur à la voix vraiment singulière, qui ne demande qu'à prendre son envol et qu'on suivra de près. 

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Moussaka. Éric Ilhareguy. Les Allusifs. 184 pages.