À la manière des compositeurs baroques, l'auteure et violoniste (baroque, justement!) Léonor de Récondo a écrit, avec Amours, un quatrième roman tout en contrepoints: en 1908, la vie de Victoire, jeune épouse bourgeoise, se superpose à celle de Céleste, sa servante de 17 ans, et l'harmonie naît de ce qu'elles ne sont rien l'une pour l'autre.

Dans la France d'avant la Première Guerre mondiale, étouffante et bien-pensante, absolument rien ne les unit, si ce n'est que le mari de l'une abuse de l'autre, comme cela se fait dans les «bonnes familles».

De cette situation à la fois banale et terrible va naître une passion inattendue, où le corps féminin devient peu à peu un instrument de transgression sociale et sexuelle, un Stradivarius sensoriel.

Avec son écriture rigoureuse, aux phrases courtes et épurées, sans épanchement ni mièvrerie, Léonor de Récondo écrit en quelque sorte un Amant de Lady Chatterley au féminin, dont la conclusion est toutefois complètement à l'opposé du roman de D.H. Lawrence. Peut-être justement parce qu'il est au féminin, donc sans aucun pouvoir dans une société encore quasi féodale.

Livre singulier, donc. Mais qui nous laisse hélas! sur notre faim au final.

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AMOURS, LÉONOR DE RÉCONDO. SABINE WESPIESER ÉDITEUR, 280 PAGES