Plongée dans l'univers halluciné d'un chauffeur de taxi de nuit d'une grande ville nord-américaine, ce troisième roman de Rawi Hage (Parfums de poussière) ne laisse pas filtrer beaucoup de lumière.

Fly, né dans un cirque et élevé par une femme à barbe, passe son temps à se masturber et à s'inventer des récits épiques dans son appartement-bibliothèque au rangement improbable. Il n'est pas un enfant de choeur et survit comme il peut, mais il n'hésite jamais à prendre la défense de la prostituée, de l'orphelin et de l'opprimé.

Figure christique imparfaite, Fly traverse ainsi la ville en récoltant les histoires d'exil, de sacrifice, d'injustice et de déchéance.

Roman érudit écrit dans une langue riche et violente, Carnaval ne fait pas de quartier. La société y est étouffante et oppressante. L'individu a peu de chances de renverser la situation. On ressort ainsi de ce tableau sans issue avec une sensation d'étouffement.

Malgré ses éclats d'humanité et son humour noir bien acéré, Rawi Hage nous communique un désespoir si profond qu'il faut quelques jours pour se remettre de cette lecture noir foncé, aboutie et sans compromis. À consommer à petites doses.

* * * 1/2

Carnaval, Rawi Hage, Alto, 376 pages.