Le narrateur, chômeur parisien de longue durée, ne peut plus payer son loyer et se retrouve à la rue, avec sa voiture pour seul toit. C'est le début d'une vie nouvelle, de flânerie, de lectures, d'abus de vodka, en marge de «l'univers étouffant du salariat», du travail «qui ruine les existences qui s'y soumettent», où le seul horizon consiste en «une vie intéressante, comme ils disent, gagner de l'argent, faire des voyages».

Haenel brosse le portrait d'une France au bord de l'apocalypse sociale. Mais, qu'il accompagne un chien vers la mort, fasse l'amour dans un cimetière ou assiste à la mort d'un sans-abri, déchiqueté par un camion-poubelle parce qu'il dormait dans une benne à ordures, les scènes sont ébauchées sans grande force d'évocation.

La deuxième partie, longue tirade relatant «un soulèvement sans mot d'ordre», la mise en marche de révolutionnaires arborant des masques dogons, dans les rues de Paris, après la mort de deux Africains sans-papiers, laisse également sceptique.

Certes, Haenel saisit bien le vent anarchiste des Occupy et Anonymous. Mais, convoquant Marx et les communards, les Dogons du Mali (que diable viennent-ils faire ici?), cette vision utopique, se voulant poétique, se révèle un peu trop fabriquée.

* * 1/2

Les renards pâles. Yannick Haenel. Gallimard. 174 pages.