Dans ce court récit initiatique, l'auteur du Poids du papillon se livre encore plus que d'habitude, avec une précision et une lucidité qui remuent.

Avec son écriture à la fois somptueuse et simple, où aucune phrase n'est anodine et chaque petite scène chargée de sens, il raconte un été dans la vie du narrateur, celui de ses 10 ans, qui lui permet d'évoquer des moments de sa vie d'homme.

L'enfant silencieux né à Naples dans l'après-guerre est en vacances à la plage avec sa mère - son père est en Amérique où il rêve d'émigrer - et ne s'explique pas «pourquoi il pleure en ville et pas à la mer».

Il observe le travail des pêcheurs, lit tout ce qui lui tombe sous la main, se lie d'amitié avec une fillette de son âge, devient la cible de la jalousie de trois gamins plus vieux...

Apprentissage de l'amour et de l'injustice: Erri de Luca pose sur tout cela le regard d'un homme qui a vécu, sans complaisance et sans adopter ton faussement naïf. «À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures.» Un livre terriblement beau et sincère.

* * * 1/2

Les poissons ne ferment pas les yeux, Erri De Luc, Gallimard, 129 pages.