Dès les premières lignes, on comprend que cette femme néerlandaise est en train de fuir quelque chose ou quelqu'un. Elle loue pour trois mois une ferme isolée dans le nord du pays de Galles et s'y réfugie avec des livres d'Emily Dickinson. Elle réaménage frénétiquement le jardin comme si elle cherchait un apaisement.

Un adolescent fait irruption sur la propriété en disant cartographier un sentier pédestre. Bradwen semble lui aussi en fuite et parler du passé l'intéresse peu. Il s'installe chez elle. Petit à petit, on apprend qu'elle préparait une thèse de doctorat sur l'oeuvre de la poétesse américaine et qu'elle vient de quitter un poste d'enseignante à l'université.

À Rotterdam, son mari et ses parents ne s'expliquent pas cette fugue. Par la sobriété de son écriture, Gerbrand Bakker crée un décor nimbé de brouillard dans lequel les êtres évoluent en silence. Il ne fouille pas leurs états d'âme, mais les regarde plutôt agir avec un détachement teinté d'humour.

Les rebondissements se multiplient dans le dernier tiers du livre et l'identité de l'héroïne est dévoilée dans les toutes dernières pages sans que le mystère soit entièrement dissipé. Un roman d'une puissance indéniable.

* * * 1/2

Le détour. Gerbrand Bakker. Gallimard, 260 pages.