Voix montante de la littérature africaine, Mia Couto parle du Mozambique de la décolonisation et d'après la guerre d'indépendance en passant par des huis clos étouffants qui deviennent des microcosmes de la réalité du pays.

C'était le cas dans l'extraordinaire L'accordeur de silences, dans lequel un père veuf vivait en autarcie avec ses deux fils, coupé du monde et de la guerre. S'il évoque toujours ce passé dans ce nouveau roman, il parle aussi de ses séquelles sur le pays en racontant l'histoire d'un médecin portugais tombé amoureux d'une belle Mozambicaine lors d'un congrès à Lisbonne et qui vient s'installer comme coopérant à Vila Cacimba pour la retrouver. Il crée un lien étroit et malsain avec ses parents atteints de saudade (mélancolie à la portugaise), et dans cette ville où une étrange épidémie court, il se retrouve prisonnier des mensonges et de la manipulation des uns et des autres.

Ce roman de Mia Couto est rempli de soleil qui tape, de fantômes qui planent, de sensualité urgente et de vieilles rancunes, mais il aborde des sujets plus actuels comme l'autoritarisme, le métissage et le racisme. Cela toujours dans une langue poétique et parfois inventée - un mari à l'agonie ne tardera pas à se «définitifier» -, portée par un réalisme magique envoûtant.

*** 1/2

Poisons de Dieu, remèdes du Diable, Mia Couto, traduit par Elisabeth Monteiro Rodriguez, Métailié, 169 pages