Le corps d'Hannah se décompose tandis que son meurtrier, à ses côtés, tente d'expliquer par l'écriture en quoi cette mort était inévitable. Hannah était une «paria», une «horreur de la nature», petite chose muette, fragile et toujours dans l'ombre que le narrateur a eu honte de désirer.

Mais il ne se sent nullement coupable, pas même assassin, car «nous sommes ceux qui soumettent, sans nom, indomptables. Et toi Hannah, tu as été l'occasion, et tu as fait venir à toi cette condamnation, comme un présage inscrit dans nos chairs et dont je suis l'exécutant».

Cruelle confession que ce premier roman de Rosalie Lavoie, dont le style soigné vient renforcer la vision glaciale du narrateur, conscient de faire partie des forts dans un monde sans pitié pour les faibles, qui d'ailleurs disparaissent sans laisser d'autres traces que celle de la parole du vainqueur.

Récit misanthrope et efficace qui illustre combien les prédateurs n'ont pas de remords envers leur proie.

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Le sang du cerf. Rosalie Lavoie. Leméac, 118 pages.