Il y a deux Henning Mankell. La star du polar nordique à qui l'on doit les enquêtes de l'inspecteur Wallander. Et l'écrivain qui couche sur papier des lettres d'amour à cette Afrique qu'il a adoptée - puisqu'il partage sa vie entre sa Suède natale et le Mozambique, où il a mis les pieds la première fois en 1973.

Publié en 1990 dans la langue originale du romancier, L'oeil du léopard puise à cette veine où coule autant de beauté que de douleur. On y suit Hans Olofson. Qui grandit en Suède dans les années 50. Élevé par un père rustre. Sans mère. Mais avec deux amis, qu'il perd de dramatiques façons.

C'est pour cela qu'il décide de réaliser le rêve de l'un d'eux et, en 1969, atterrit en république indépendante de Zambie. Une république toute neuve. Mais où les rancoeurs et la haine sont solidement ancrées dans un passé tout sauf oublié.

Racontant l'Histoire à travers une histoire, Henning Mankell dit la peur du jeune homme à l'arrivée. Et les changements qui s'opèrent en lui alors que passe une vingtaine d'années. Le tout est livré avec fièvre, reflet de l'état dans lequel se trouve Hans : il se souvient à travers le délire provoqué par une crise de paludisme.

Un roman fort et dur. Où rien n'est tout blanc ni tout noir (c'est le cas de le dire). Destiné aux fans de «l'autre» Mankell plus qu'à ceux de Kurt Wallander.

____________________________________________________________________________

* * * 1/2

L'OEIL DU LÉOPARD. HENNING MANKELL. (TRADUIT PAR AGNETA SÉGOL ET MARIANNE SÉGOL-SAMOY). SEUIL, 343 PAGES.