Une deuxième «trilogie berlinoise» se termine avec Hôtel Adlon - puisque Philip Kerr nous offre ici un sixième morceau du puzzle qu'il a commencé il y a une vingtaine d'années et dans lequel il expose, sans ordre chronologique mais avec force détails et pertinence, la vie de ce flic berlinois spirituellement apparenté à Philip Marlowe qu'est Bernie Gunther.

Un sixième morceau qui est une pièce de choix, où l'on retrouve Gunther en deux temps: première partie, à Berlin en 1934, au moment des préparatifs des Jeux olympiques (donc, avant les événements survenus dans le tout premier tome de la série, L'été de cristal); seconde partie, à La Havane en 1954, dans la continuité de l'aventure argentine relatée dans le tome précédent, Une douce flamme.

Bernie, notre Bernie, est toujours le même. Désabusé et amer, insolent et grinçant d'humour noir, futé comme un renard et amateur de femmes. Dans la première partie d'Hôtel Adlon, il a déjà quitté les forces policières pour les positions idéologiques que l'on sait et est maintenant responsable de la sécurité au sein de l'historique établissement hôtelier. Où un meurtre est commis. La victime est un riche homme d'affaires ayant des visées sur la construction du stade olympique. Peut-être y a-t-il un lien avec la «noyade» de ce boxeur juif, dont le corps a été repêché dans un canal...

En parallèle, Gunther fait la connaissance - et un peu plus - d'une journaliste juive américaine qui voudrait inciter les États-Unis à ne pas participer aux Jeux olympiques. Cette belle, il la retrouvera à La Havane, 20 ans plus tard. Alors qu'il fête ses 60 ans, elle n'a pas changé. Ou si peu. Oh, et bien sûr, il y aura là aussi meurtre et enquête! C'est le moteur «officiel» de ces romans... qui sont plus que cela. Car si les intrigues sont sophistiquées et intelligentes, elles se déploient comme d'habitude sur fond d'histoire fouillée et fascinante. En première partie, la montée du nazisme et son impact sur la population berlinoise; en seconde, la tension montant à Cuba et la présence de plus en plus importante de Fidel Castro sur l'échiquier du pouvoir.

En prime, Hôtel Adlon nous sert un punch assez percutant pour ébranler même ce très cynique Bernie Gunther. Qui ne peut avoir fait ici son dernier tour de piste.

Hôtel Adlon

Philip Kerr

Éditions du masque

509 pages

*** 1/2