Premier roman publié par Les Allusifs pour cette rentrée, c'est aussi le septième de l'auteur salvadorien, parmi lesquels Déraison, petit chef-d'oeuvre d'humour noir. Cette fois, on rit moins mais le malaise demeure: de la névrose familiale aux violences absurdes entre les peuples, il n'y a qu'un pas, semble nous dire Horacio Castellanos Moya.

Découpé en trois parties qui jouent sur des genres différents, pièce de théâtre, genre épistolaire et journal, Effondrement est le portrait, de 1962 à 1991, d'une bourgeoise hondurienne aigrie, névrosée, qui s'est donné pour mission de pourrir la vie de son entourage. On est en 1962. Doña Lena enferme son mari dans la salle de bains pour qu'il ne puisse assister au mariage de leur fille, qu'elle désapprouve. S'ensuit une soixantaine de pages de dialogues tragicomiques de dispute conjugale, où elle le traite de porc, de taré, tandis qu'il la supplie de lui ouvrir la porte. On pense à la femme hystérique dans La vie conjugale, de Sergio Pitol.

Ensuite, la correspondance entre le père et sa fille Esther, exilée au Salvador pour échapper à la tyrannie maternelle. La grande histoire prend le pas: la guerre du football, en 1969, violences politiques entre Salvadoriens et Honduriens, est racontée par Esther avec une telle candeur qu'on en rirait presque. Enfin, le roman s'achève avec la voix d'un domestique, témoin des derniers jours de doña Lena, en 1991. Cette fois, c'est la pitié qui l'emporte. La vieille garce meurt et même sa fille pleure. Une fin en queue de poisson qui fait perdurer le malaise après qu'on a refermé le roman. Grinçant.

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Effondrement. Horacio Castellanos Moya. Les Allusifs. 213 pages, 23,95 $.