Il a beau avoir 84 ans, Roger Taillibert ne chôme pas. Il crée encore des édifices et publie vendredi le premier livre d'une collection sur sa vie, ses oeuvres et ses réflexions. L'architecte du Stade olympique est aussi le sujet d'un documentaire préparé par une équipe américaine et dirigée par Leellen Patchen. Le film de 90 minutes sera produit en français et en anglais.

Roger Taillibert a reçu La Presse hier dans sa maison de Saint-Sauveur, dans les Laurentides. Une vieille maison qu'il a agrandie pour la rapprocher de la forêt. M. Taillibert est venu passer quelques jours au Québec pour se reposer. Il est en grande forme. Toujours svelte, il ne fait pas son âge.

«Le travail, c'est la santé» doit être son adage. Il travaille encore beaucoup. Dans quelques semaines, on inaugurera un bâtiment du groupe pharmaceutique français Pierre Fabre au nouveau Canceropôle de Toulouse. Il en a signé l'architecture et est l'un des concepteurs de ce centre de recherche médicale européen.

«Je termine aussi la plus grande tour de Doha, au Qatar, d'une hauteur de 320 m, dit-il. Et j'en prépare deux pour Abou Dhabi.»

M. Taillibert lancera vendredi, au Canada et aux États-Unis, un livre aux éditions Dilecta. Il y est interviewé par Philippe Ungar, un auteur qui a déjà publié un entretien avec le violoncelliste Rostropovitch.

Ce premier livre de la collection Le feu sous la cendre est intitulé Entrée principale. Au centre de l'ouvrage de 80 pages, des photos rappellent ses créations: la piscine olympique de Deauville (1966), le Centre d'entraînement des athlètes olympiques français dans les Pyrénées (1967), le Parc des Princes de Paris (1972), le Stade olympique de Montréal (1976) ou l'Académie des sports de Doha (2005). Pour chaque réalisation, on a reproduit une peinture de M. Taillibert.

«Le livre évoque la thérapeutique de l'architecture, dit-il, l'influence qu'elle a sur les hommes. Il s'adresse à l'homme de demain qui doit avoir un logement qui génère une émotion. L'homme ne veut pas vivre dans des cases. Pourquoi y a-t-il tant de troubles dans les banlieues? Parce qu'on a entassé des hommes comme des poulets dans des cases.»

Roger Taillibert louange la création du nouveau déambulatoire situé au rez-de-chaussée de l'Hôpital général juif, avec des baies vitrées et des bancs. Une décision qui a du bon sens, dit-il. «L'architecture n'est pas construire, mais donner un espace pour vivre, avec une émotion et une lumière.»

À propos du Stade olympique

Évidemment, le livre aborde aussi «son» Stade olympique. Le second livre portera entièrement sur le Parc olympique. «En 100 pages, je dirai tout ce qui s'est passé», assure-t-il.

Roger Taillibert fustige le choix de la Régie des installations olympiques de poser un toit fixe sur le stade. Il dit que c'est un non-sens, que tous les stades du monde sont maintenant sans toit ou avec un toit mobile. «C'est une connerie de plus, lance-t-il. SNC-Lavalin est un gros bureau, de grande qualité, mais il n'a jamais construit de stade. Un stade, ça doit pouvoir s'ouvrir pour accueillir l'athlétisme, le soccer, le rugby ou le baseball.»

Selon lui, on n'aurait jamais dû confier la gestion du Stade à des politiciens. «Ce sont les sportifs qui devraient s'en occuper», croit-il.

Quant aux controverses entourant le Stade, il les rejette en affirmant que, si on l'avait personnellement associé aux décisions prises par des ingénieurs ou des gestionnaires, il n'y aurait pas eu de problèmes.

Amer, M. Taillibert? «Non, tant pis, ils ont ce qu'ils méritent», lâche-t-il.