L'auteure jeunesse Chloé Varin terminait la rédaction du dernier tome de sa série Planches d'enfer lorsque les éditions de la Bagnole lui ont donné carte blanche pour écrire une nouvelle série pour adolescents. L'envie de collaborer avec des créateurs du milieu littéraire lui a inspiré l'idée du projet collectif Casting, dont l'intrigue se déroule sur un plateau de tournage. Avec ses deux complices, le comédien, auteur et metteur en scène Simon Boulerice, et l'auteure-compositrice-interprète Stéphanie Lapointe, Chloé Varin a entrepris de raconter les (més)aventures derrière le tournage du film Une famille à l'envers.

«Les cours de théâtre, les coachings, les auditions et les tournages ont fait partie intégrante de mon enfance et de mon adolescence. Les jeunes sont fascinés par l'univers du cinéma, ils ressentent fortement l'attrait de la célébrité. J'avais envie de montrer l'envers du décor», confie-t-elle.

Chacun d'entre eux incarne à sa façon «une facette de cette aventure cinématographique» à travers la voix de trois personnages bien différents, mais tous aussi attachants. Chloé Varin a accepté de lever le rideau sur les coulisses de la série Casting.

Est-ce que tu t'es inspirée de ton expérience personnelle pour créer le personnage de Charlotte?

Oui. Il y a beaucoup de Charlotte en moi, et vice versa. Nous partageons la même passion pour le théâtre, la même sensibilité. À son âge, je vivais les mêmes remises en question, mais j'avais plus d'expérience qu'elle en audition. Par contre, Charlotte est bien meilleure actrice que moi! Elle porte le prénom de ma grand-mère maternelle. J'ai d'ailleurs rapporté plusieurs anecdotes de plateau et autres expériences personnelles dans mon roman, mais je ne vous dis pas lesquelles... À vous de deviner.

Comment les deux autres auteurs ont-ils été choisis?

Je tenais à ce qu'ils connaissent le métier d'acteur de l'intérieur, qu'ils aient gravité dans le milieu de la télévision ou du cinéma. Aussi, il fallait que j'aie une certaine affinité avec les auteurs pressentis parce qu'on serait en collaboration étroite pour les mois à venir et je voulais en garder un bon souvenir! Le nom de Simon Boulerice s'est imposé très tôt dans les discussions avec la maison d'édition. Il avait déjà publié pour la Bagnole et il est sans contredit l'un des auteurs les plus adorables et prolifiques que je connaisse. Quant à Stéphanie Lapointe, je ne la connaissais pas personnellement, mais nous avions auditionné pour le même rôle à la télé, et c'est elle qui l'avait décroché. Dix ans plus tard, Stéphanie m'a été présentée par une amie auteure pressentie pour Casting. L'auteure en question n'était pas disponible, mais Stéphanie s'est montrée très intéressée par le projet. Entre elle et moi aussi, la chimie a tout de suite opéré!

Vous êtes-vous concertés pour fignoler les détails qui caractérisent chacun des personnages?

Nous nous sommes concertés tout au long du processus, que ce soit par courriel, par Facebook ou par téléphone. Nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, aussi. Nous avons dressé une chronologie et une bible de personnages pour un maximum de cohérence. Il y avait tellement de détails à coordonner, que ce soit par rapport aux personnages, aux lieux ou à nos intrigues respectives. On a eu quelques moments de panique, mais tout est bien qui finit bien!

Tu cites plusieurs proverbes amérindiens dans ton livre... Est-ce qu'ils ont une signification particulière pour toi?

Je ne tire pas ces proverbes d'une expérience personnelle, plutôt d'un intérêt pour la culture et la mythologie amérindiennes auxquelles je m'initie en dilettante depuis mon premier passage sur la Côte-Nord, en 2012. J'ai recensé une vingtaine de proverbes amérindiens qui ont trouvé une résonance en moi, certains ont été intégrés au récit. De plus, l'amie d'enfance de Charlotte s'appelle Tina en hommage à Tina Fontaine, jeune Amérindienne de 15 ans assassinée l'été dernier, durant la rédaction de ce roman. Ce drame n'est malheureusement pas un cas isolé et la nécessité d'ouvrir une commission d'enquête nationale sur la disparition de milliers de femmes autochtones se fait d'autant plus criante. Ces clins d'oeil et ces références, c'est ma façon de leur dire qu'on ne les oublie pas, qu'on pense à elles.

Est-ce que tu crois que la littérature jeunesse se doit de passer des messages ou d'aborder des questions qui préoccupent les jeunes?

Je crois qu'il est important d'envoyer les bons messages sans être moralisateur. Les jeunes veulent du vrai, du crédible, on ne doit pas les faire décrocher en étant trop pédagogues, mais la lecture doit élever l'esprit, pas l'abaisser. Les jeunes ont besoin de modèles positifs. À l'adolescence, j'aurais aimé lire des romans jeunesse comme ceux qui se publient actuellement au Québec. L'offre est impressionnante, on hésite moins à traiter de sujets tabous, à démystifier certaines réalités. Cela dit, je suis auteure et non psychologue, alors j'essaie de trouver un certain équilibre pour que la sensibilisation n'éclipse pas le divertissement.

Est-ce qu'on peut s'attendre à une suite pour Casting?

Ce n'est pas impossible, l'idée nous tente beaucoup! On se garde une certaine ouverture pour une suite à Casting, mais il faut du courage, beaucoup de temps et un soupçon d'inconscience pour se lancer tête première dans un projet d'une telle envergure. Si les échos du public sont positifs et qu'on parvient à nouveau à réunir tous ces ingrédients, on pourrait très bien retenter l'expérience. Qui sait?

LES STARS DE CASTING:

VICTORIA SELON STÉPHANIE LAPOINTE

Lorsqu'elle s'est lancée dans l'aventure, Stéphanie Lapointe était convaincue qu'elle écrirait l'histoire de Charlotte, nous raconte-t-elle. La surprise de ne pas décrocher le premier rôle lui a donc bien servi pour se mettre dans la peau de Victoria, qui était certaine d'incarner la vedette du film, Alix, aux côtés du beau Victor... La jeune fille de 13 ans doit ainsi composer avec la déception d'interpréter un personnage secondaire, en plus de vivre avec la colère qu'elle ressent face au cancer de sa mère. Son caractère fort et sa maturité l'aideront malgré tout à lutter contre les pénibles épreuves qui l'attendent.

CHARLOTTE SELON CHLOÉ VARIN

«Charlotte, c'est un peu le lecteur qui est fasciné par le milieu [du cinéma]», lance d'emblée Chloé Varin. Candide et spontanée, elle a tout à apprendre du métier d'acteur, dans lequel elle a été catapultée après avoir remporté des auditions publiques ouvertes à toutes les adolescentes de 12 à 15 ans de la province. Elle est timide à sa manière et avoue n'avoir jamais quitté la Côte-Nord, «sinon pour aller magasiner à Chicoutimi»! Ce tournage lui donne donc l'occasion de découvrir Montréal et de goûter à cette célébrité dont raffolent tant de filles de son âge.

VICTOR SELON SIMON BOULERICE

Âgé de 16 ans, l'ancien enfant vedette est celui qui cumule le plus d'expérience sur les plateaux de tournage parmi les trois protagonistes de Casting. «Tout lui réussit: il est la coqueluche des filles et c'est un vrai talent. Il est rigoureux, travaillant, méticuleux et super beau, mais aussi vulnérable et complexé», explique Simon Boulerice. Victor Beauregard est surtout un solitaire qui préfère la compagnie des livres aux tapis rouges et aux flashs des paparazzis. Il porte par ailleurs un bien lourd fardeau sur ses épaules - «un trouble sous la carcasse», comme il l'admet lui-même.

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LA SÉRIE CASTING. À partir de 12 ans.

Charlotte. Chloé Varin. La Bagnole, 192 pages.

Victor. Simon Boulerice. La Bagnole, 176 pages.

Victoria. Stéphanie Lapointe. La Bagnole, 200 pages.