Véritable phénomène d'édition dans le monde de la bande dessinée francophone avec près de 400 000 albums vendus en France et 60 000 au Québec le succès des Nombrils repose notamment sur l'humour au vitriol. On croyait avoir atteint des sommets de méchanceté avec Jenny et Vicky, les deux garces tyranniques de la populaire série bédé. Erreur. Pour leur quatrième tome, Duel de belles, les Québécois Marc Delafontaine et Maryse Dubuc (alias Delaf et Dubuc) poussent un cran plus loin les limites de la cruauté.

Le trio composé de Jenny, Vicky et leur éternel souffre-douleur Karine reprend là où on l'avait laissé dans les dernières cases du tome précédent. Karine est dévastée. Dan l'a quittée pour partir en Afrique avec Mélanie. Et ses copines ne lui sont pas d'un grand secours. Elles ont le moral au plus bas depuis le départ de John John. Jamais elles ne retrouveront un autre garçon avec une aussi belle moto...

Les trois filles trouveront en Mélanie une ennemie parfaite sur qui passer leur mauvaise humeur. Mélanie, la perfide voleuse d'amoureux. La fausse grano-humanitaire-équitable qui attire tous les regards masculins depuis son retour d'Afrique (au grand dam de Jenny et Vicky).

«Mélanie nous fait atteindre un nouveau niveau de méchanceté, reconnaît la scénariste Maryse Dubuc. Elle est consciente de faire du mal, ce qui n'est pas le cas de Jenny! Vicky en a peut-être conscience, mais il y a des circonstances atténuantes, considérant la façon dont sa famille la traite. Avec Mélanie, on est dans la méchanceté assumée. Avec elle, Karine s'est trouvé une adversaire de taille.»

Après trois albums dans le rôle du paillasson, un nouveau destin attendrait-il Karine? «Depuis le début de la série, Karine était une victime consentante de ses amies. Il était temps qu'elle se prenne en mains. Qu'elle se voit autrement qu'en simple victime.» L'éclair de lucidité tant attendu se fera par le truchement d'un étrange messager: Albin, musicien de rue et auteur de «chansons personnalisées» qui révèlent la vraie nature de ceux qui les écoutent.

Véritable phénomène d'édition dans le monde de la bande dessinée francophone - avec près de 400 000 albums vendus en France et 60 000 au Québec - le succès des Nombrils repose notamment sur une mécanique de gags parfaitement huilée.

À ce chapitre, Duel de belles ne fait pas exception. Les blagues déboulent à la vitesse Grand V et l'humour au vitriol n'épargne personne. La vie est cruelle, et puis après? comme l'écrivent si bien les auteurs en quatrième de couverture.

Style efficace

Sur le plan graphique, Delaf a conservé son style efficace et vivant, jamais très loin de la caricature. Il a même ajouté quelques touches humoristiques en arrière-plan, des petits détails qui viennent enrichir la deuxième lecture.

L'intérêt de cet album repose aussi grandement sur la forme narrative que s'imposent désormais les auteurs. Les gags ne suffisent plus. Au fil des cases et des événements, les personnages se transforment et évoluent. Certains plus que d'autres... Et la chute, inattendue, laisse d'ailleurs entrevoir des orages dans le ciel des Nombrils.

«C'est la fin d'un cycle et le début d'un autre. Des changements risquent de perturber la dynamique du trio», dit la scénariste sans trop vouloir révéler quelles aventures elle réserve à ses héroïnes pas comme les autres.

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* * * 1/2

Duel de belles (Dupuis). Les Nombrils - Tome 4.