Le prix Médicis, l'un des plus prestigieux prix littéraires français, a été attribué mercredi à Ivan Jablonka pour Laëtitia ou la fin des hommes, portrait sensible d'une victime d'un fait divers qui avait bouleversé la France, et le Médicis étranger au Suédois Steve Sem-Sandberg pour Les élus.

Le livre de Jablonka, écrivain, sociologue et historien de 43 ans, est un peu un ovni littéraire car il n'est ni un roman, ni un essai, ni du journalisme d'investigation mais un peu tout cela à la fois.

Il restitue la vie de Laëtitia Perrais, jeune femme de 18 ans, placée avec sa soeur jumelle dans une famille d'accueil, morte violée et assassinée en 2011 dans l'ouest de la France. Ce portrait d'une vie fracassée dresse également une radiographie sans complaisance de la France du début du XXIe siècle.

En sociologue, Ivan Jablonka s'interroge sur «l'énorme misère que notre société produit». Le fait divers est traité comme un objet d'histoire. Il est question des inégalités qui divisent les individus dès l'enfance, du rôle des médias, du manque de moyens alloués à la justice, de politique aussi quand elle cherche, comme ce fut le cas au moment du drame, à instrumentaliser une tragédie à des fins partisanes.

L'auteur a interrogé les témoins de la tragédie, a rencontré les acteurs de l'enquête et assisté au procès en appel du meurtrier en 2015.

Ce récit, salué par la critique, avait déjà remporté le prix littéraire du journal Le Monde.

«J'ai une pensée pour Laetitia, pour sa soeur Jessica et pour tous leurs proches», a commenté l'écrivain en saluant un «extraordinaire honneur».

Ivan Jablonka était en compétition avec six autres auteurs. Il a obtenu 5 voix contre 3 à la romancière mauricienne Nathacha Appanah (Tropique de la violence).

Les élus, de Steve Sem-Sandberg, écrivain suédois de 58 ans, a pour cadre un centre pour enfants handicapés en 1941 à Vienne, dont certains sont promis à l'extermination.