L'écrivain américain Paul Auster vient d'achever un marathon d'écriture de plus de trois années consacrées à la rédaction d'un roman de 925 pages, «le plus volumineux de [sa] vie». Six ans après la sortie de sa dernière fiction, Sunset Park, le livre paraîtra d'abord en anglais au début de 2017.

La Presse avait tenté de prendre contact avec Paul Auster en mars dernier pour lui parler de La pipe d'Oppen, ce recueil de préfaces et de discours qui a été récemment publié en français aux éditions Actes Sud. Mais il était trop occupé pour parler à un journaliste. Et pour cause, a-t-on appris vendredi dernier lors d'un entretien téléphonique. En mars, l'écrivain achevait le projet titanesque qui l'a tenu en haleine au cours des trois dernières années: l'écriture de son 19e roman.

«Le projet entier m'aura pris plus de trois ans, et je l'ai terminé il y a seulement trois semaines, dit Paul Auster, joint au téléphone à sa résidence de Brooklyn. Je suis tellement épuisé que je suis à peine capable de sortir marcher! C'est comme si j'avais vécu dans un bunker pendant trois ans. Je n'ai fait qu'écrire et maintenant, je n'ai besoin que d'une chose: sortir prendre l'air, car mon corps et mon esprit sont très faibles!»

Quand on demande à Paul Auster pourquoi l'écriture de ce nouveau roman a été si épuisante, il explique que sa rédaction a été si longue et si intense que son manuscrit représente plus de 1100 pages. «Mon éditeur m'a dit que le livre en anglais devrait probablement faire 925 pages, dit-il. C'est quand même beaucoup de pages à écrire!»

L'écrivain préfère ne pas dévoiler l'histoire de ce nouveau roman. Il souhaite que la surprise soit totale pour ses fidèles lecteurs. Il consent toutefois à dire qu'il s'agit d'une sorte de «saga».

«Quand vous allez commencer à le lire, vous allez comprendre pourquoi il m'a pris tant de temps à écrire et pourquoi il sera si volumineux.»

Paul Auster n'a pas publié de roman depuis 2010 avec Sunset Park, un livre qui évoque les sombres conséquences de la crise financière de 2008 sur la population américaine. Les amateurs de l'écrivain américain commençaient donc à trépigner d'impatience. Durant ces six années, il a toutefois sorti deux ouvrages autobiographiques - Winter Journal, en 2012, et Report from the Interior, en 2013 -, ainsi que Here and Now, un échange épistolaire avec l'écrivain nobélisé sud-africain J. M. Coetzee, en 2013 également.

«L'écriture de Sunset Park m'avait pris beaucoup d'énergie, dit Paul Auster. J'étais dans une période de ma vie très intense et j'ai été incapable d'écrire de la fiction pendant plusieurs années. C'est la raison pour laquelle j'ai écrit les deux ouvrages autobiographiques. J'avais besoin de penser à autre chose. Et puis, quand j'ai terminé Report from the Interior, j'ai eu l'idée de ce nouveau roman et je m'y suis plongé totalement, m'y consacrant avec un engagement sans limite. J'espère que vous serez heureux de le lire quand il sortira, soit à la fin de janvier ou au début de février 2017. Mais je ne sais pas encore quand il sera traduit en français.»

Le même plaisir, malgré la fatigue

Quand on demande à Paul Auster s'il a toujours le même plaisir à écrire de la fiction, il explique que, pour son nouveau roman, il a ressenti un immense et incomparable bien-être.

«C'est toujours difficile, dit-il. Je m'investis chaque jour dans cette tâche comme je l'ai toujours fait. Après une journée de travail, j'étais si fatigué mentalement et physiquement que je m'écroulais littéralement sur mon lit. Mais le plaisir de finalement trouver la bonne formulation ou le bon paragraphe est toujours le même. C'est drôle parce que je commence à être assez âgé et pourtant, je me sens encore très jeune, comme si j'étais un petit garçon qui découvre et apprend, rempli de détermination. Pour moi, le travail est toujours aussi neuf, aussi excitant et rafraîchissant. Et c'est normal puisque j'écris sur la vie. Donc, j'apprends encore comment vivre. Vous n'arrêtez jamais d'apprendre, de grandir et d'essayer...»