A-t-elle donné son avis? Était-elle vraiment d'accord? L'enthousiasme suscité par l'annonce d'un deuxième roman de l'Américaine Harper Lee, 55 ans après son best-seller Ne tirez pas sur l'Oiseau moqueur, a depuis cédé la place au doute et à la controverse.

Mme Lee, 88 ans, a fait savoir ce week-end par son avocate Tonja Carter qu'elle était «extrêmement blessée et humiliée» par ceux doutant qu'elle ait réellement donné son accord à la publication de Go Set a Watchman, écrit dans les années 1950, et qui, selon son avocate, a été retrouvé cet automne dans des cartons.

Harper Lee vit dans une maison de retraite de Monroeville, en Alabama. Elle aurait souffert d'un AVC en 2007. De tout temps extrêmement réservée, elle ne donne pas d'interview.

Ne tirez pas sur l'Oiseau moqueur, son seul roman jamais publié, un très grand classique de la littérature américaine, lui avait valu un prix Pulitzer en 1961, un an après sa sortie. Il a été vendu à plus de 30 millions d'exemplaires, traduit en plus de 40 langues, et est étudié dans de très nombreuses écoles et lycées américains.

Plaidoyer pour la justice, il raconte l'histoire d'un avocat blanc, Atticus Finch, défendant un Noir accusé de viol pendant la Grande Dépression des années 30, dans une ville fictive et raciste d'Alabama. La narratrice du roman est la fille d'Atticus Finch, Scout.

Mais depuis, Harper Lee n'avait rien publié, expliquant à des proches qu'elle n'en avait pas l'intention, après le succès phénoménal de son premier et seul roman.

D'où le doute. À Monroeville, plusieurs personnes disant bien la connaître ont confié à la presse locale qu'ils pensaient que ses désirs n'avaient pas été respectés.

«Je ne pense pas qu'elle ait été d'accord», a ainsi déclaré la propriétaire du Court House Café, Janet Sawyer, sur le site AL.com, affirmant que la santé d'Harper Lee avait décliné depuis son AVC et ne lui permettait pas de prendre de telles décisions.

Sortie en juillet

«C'est une femme très forte, indépendante et sage qui devrait savourer la découverte de son roman longtemps perdu», a expliqué à l'inverse son avocate au New York Times, dans une série de courriels et de textos. «Au lieu de cela, elle doit défendre sa propre crédibilité et sa décision», a regretté Mme Carter, ajoutant que sa cliente était «extrêmement blessée et humiliée» par la controverse.

Sollicitée par l'AFP, l'avocate n'a pas souhaité s'exprimer davantage.

Go Set a Watchman dont Harper, filiale d'HarperCollins a acquis les droits pour l'Amérique du Nord pour un montant non précisé, doit sortir en juillet, avec de solides ventes assurées.

Un historien qui rendrait régulièrement visite à Harper Lee, Wayne Flynt, s'est aussi dit surpris après l'annonce de sa sortie.

«Je ne pense pas qu'aucun de ses amis les plus proches, et j'en connais la plupart, n'était au courant», a-t-il confié, selon AL.com.

Mais il a rejeté l'idée que la publication de ce qui est une suite à Ne tirez pas sur l'Oiseau moqueur, même si Go Set a Watchman a été écrit avant, ait été prise sans le plein accord de l'auteure.

«Hier, elle était plutôt lucide, j'étais là, je lui ai parlé», avait-il déclaré la semaine dernière.

«Go Set a Watchman» met en scène certains des personnages que «Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur».

Il avait à l'époque été rejeté par l'éditeur, qui avait demandé à Harper Lee une nouvelle version où la narratrice, Scout, serait enfant, et non adulte comme elle l'est dans Go Set a Watchman. De là était né Ne tirez pas sur l'Oiseau moqueur, comme elle l'a confié la semaine dernière dans un communiqué d'HarperCollins.