Événement littéraire: Les Terres du couchant, un livre inédit de Julien Gracq, mort en 2007, sera publié jeudi en France, cinquante ans après sa rédaction par l'auteur du légendaire Rivage des Syrtes.

En 1953, Gracq entreprend un roman qui se situe comme Le rivage des Syrtes - pour lequel l'écrivain avait refusé le Goncourt en 1951 -, dans cette zone où histoire et mythe, imaginaire collectif et destins individuels s'entrelacent. Les Terres du couchant, c'est une quête, un périple, où la route et le spectre de la guerre, tiennent un rôle essentiel.

L'histoire se déroule quelque part aux limites d'un Moyen Âge barbare, autour d'une ville assiégée, aux confins d'un royaume finissant, explique Bertrand Fillaudeau, son éditeur chez José Corti.

La deuxième partie du récit s'organise dans la cité assiégée sur laquelle plane la menace d'un cataclysme imminent: «Une ville murée pour le néant», écrit Gracq.

«L'existence du manuscrit n'était pas un secret, il se trouvait à la Bibliothèque nationale de France. Gracq avait écrit trois versions du livre, nous les avons comparées et choisi la troisième, celle qui comportait le moins d'annotations», dit à l'AFP Bertrand Fillaudeau qui a travaillé en étroite collaboration avec l'universitaire allemande Bernhild Boie, désignée par Gracq comme son exécutrice testamentaire.

«Les vices dans le gouvernement du Royaume étaient si vieux, et leurs méfaits si capricieux dans leur enchevêtrement qu'ils finissaient par participer des hauts et des bas qui donnent sa variété à tout spectacle naturel: si on formait le voeu parfois de les voir «s'arranger», c'était de la même lèvre pieuse dont on souhaite que le temps «s'arrange», après la grêle ou la gelée.»

Julien Gracq travaille ce livre pendant trois étés. Travail ardu, hésitant, qu'il abandonne en 1956 pour écrire Un balcon en forêt et dont témoignent quelque 500 pages manuscrites du fonds Gracq, légué à la BNF. «Le récit publié est très proche d'une version définitive, même si, pour son auteur, il n'avait pas trouvé sa forme définitive. Un fragment du texte est d'ailleurs repris tel quel dans 25 pages de La route».

«Cette publication posthume à laquelle Julien Gracq ne s'était pas opposé, ne bouleverse pas la vision que nous pouvions avoir de son oeuvre, mais elle la complète d'une manière très significative. C'est du pur Gracq et un pur plaisir de lecture», ajoute l'éditeur.

Les éditions José Corti avaient déjà publié en 2011 deux inédits surprenants de Julien Gracq, son journal du 10 mai au 2 juin 1940, quand il est lieutenant d'infanterie, et une fiction tirée de ces événements, réunis en un seul volume sous le titre Manuscrits de guerre.

Julien Gracq, de son vrai nom Louis Poirier, est né le 27 juillet 1910 et mort le 22 décembre 2007.