Un conte fantasmagorique inspiré de la violence qui déchire l'Irak, Frankenstein à Bagdad, d'Ahmed Saadawi, a obtenu le Booker Prize arabe, qui couronne chaque année une oeuvre littéraire dans le monde arabe.

Le prix, créé il y a sept ans sur le modèle du Man Booker Prize britannique et financé par les Émirats arabes unis, vise à encourager la production littéraire arabe, relativement faible.

Les résultats ont été annoncés mardi soir, à la veille de l'ouverture mercredi de la Foire internationale du livre à Abou Dhabi, à laquelle prennent part près de 1200 éditeurs.

Dans Frankenstein à Bagdad, un brocanteur se met à recoudre les lambeaux de chair des victimes des explosions quasi-quotidiennes qui secouent la capitale en un seul corps, qui prend vie. Ce «Frankenstein» décide alors de venger toutes les victimes des violences.

«Mon livre adresse un message au lecteur: nous ne pouvons pas mettre fin à la violence avant d'en comprendre les raisons, et toute attitude passive équivaut à un encouragement tacite de cette violence», a déclaré l'écrivain irakien à l'AFP.

Les oeuvres des cinq autres finalistes reflètent également, à des degrés divers, la violence, l'éclatement et parfois le désespoir des sociétés arabes.

«Le roman arabe reflète la réalité. Les révolutions arabes nous ont permis de parler librement de nos problèmes», a déclaré à l'AFP l'écrivain syrien Khaled Khalifa.

Son roman, Pas de couteaux dans les cuisines de cette ville, raconte sans complaisance comment la répression implacable du régime syrien a abouti à l'éclatement et à la fin des illusions d'une famille d'Alep, dans le nord de la Syrie.

Quant à la romancière irakienne Inaam Kachachi, également finaliste, elle a choisi de raconter la souffrance des membres de la diaspora irakienne à travers l'histoire d'une femme médecin, chrétienne irakienne, et de sa nostalgie pour l'Irak d'avant la dictature de Saddam Hussein.

Dans son roman Tashari, l'un des héros invente un cimetière virtuel pour enterrer les membres de la famille qui meurent aux quatre coins du monde.

«L'écrivain ne peut pas tourner le dos à la réalité du monde arabe, aux crises qui l'assiègent de toutes parts», a déclaré la romancière à l'AFP.