La fièvre monte parmi les candidats aux lauriers littéraires d'automne, un marathon unique au monde qui débute jeudi par le Grand prix du roman de l'Académie française, en attendant le Goncourt le 4 novembre.

Le Renaudot sera proclamé le même jour que le Goncourt, le plus convoité des prix et meilleur gage de ventes dopées. Le prix Décembre sera attribué le 5 novembre, les prix Femina (français et étranger) le 6, les prix Médicis (français et étranger) le 12 et l'Interallié le 13 novembre.

En lice jeudi sous la Coupole, trois romans à l'humeur vagabonde: Apollinaria, de Capucine Motte (Lattès), Plonger, de Christophe Ono-dit-Biot (Gallimard), également pressenti pour le Renaudot, et Les évaporés, de Thomas B. Reverdy (Flammarion), aussi en lice pour le Prix Décembre.

Le narrateur de Plonger enquête sur la mort mystérieuse de sa femme sur un rivage lointain et remonte pour son fils le cours de leur histoire d'amour. Christophe Ono-dit-Biot parle du désir d'absolu, de la beauté fanée mais plus que jamais précieuse de la vieille Europe et de la transmission d'un père à son enfant.

La poésie berce Les évaporés de Thomas B. Reverdy, un voyage dans un Japon envoûtant qui conjugue polar, histoire d'amour et portrait d'un pays meurtri après Fukushima. Une jeune Japonaise, épaulée par son ex-amant américain, part sur les traces de son père qui a choisi de disparaître.

Le deuxième roman de Capucine Motte raconte la passion tumultueuse entre Dostoïevski et sa muse Apollinaria Souslova, fille d'un serf émancipé, qui inspira à l'auteur de Crime et châtiment plusieurs de ses héroïnes. Cette biographie romancée emporte le lecteur de Saint-Pétersbourg à Paris ou Baden-Baden.

Favoris et révélations

Après l'Académie, la course reprendra de plus belle. Sur la ligne de départ, des auteurs reconnus, des révélations et des outsiders. D'ultimes sélections sont néanmoins attendues et certains seront éliminés du sprint final.

Parmi les favoris qui se dessinent, un roman haletant à la veine picaresque, Au revoir là-haut de Pierre Lemaitre (Albin Michel), l'histoire de démobilisés de la Grande Guerre en galère qui montent une arnaque spectaculaire et amorale. Première incursion hors du polar de cet écrivain de 62 ans, ce roman a captivé à ce jour les jurés du Goncourt, du Renaudot, du Femina et de l'Interallié.

Autre récit sur fond de guerre et autre révélation, Arden, de Frédéric Verger (Gallimard), a séduit les jurés Goncourt, Médicis et Décembre. Le premier roman foisonnant de ce professeur de français nous entraîne dans un pays d'opérette, sur les pas de deux musiciens pris dans l'étau nazi.

Renaudot, Médicis et Femina sont en ligne de mire pour le romancier libanais et professeur de lettres françaises Charif Majdalani. Sa fresque romanesque, Le dernier seigneur de Marsad (Seuil), nous plonge au coeur du Liban, de 1964 aux années 1980. C'est aussi une magnifique fable sur la vanité du pouvoir et la fin d'un monde.

Parmi les autres «multisélectionnés» à ce jour, Le cas Eduard Einstein, de Laurent Seksik (Flammarion), en lice pour le Goncourt et le Femina, La conjuration (Fayard) de Philippe Vasset, retenu par le Femina, le Médicis et l'Interallié, Sulak, de Philippe Jaenada (Julliard), en piste pour le Renaudot et l'Interallié, et Naissance (Grasset), de Yann Moix, sur la liste du Renaudot et du prix Décembre.

Dans ce concert très masculin, deux romancières se détachent: Karine Tuil avec L'invention de nos vies (Grasset), pressentie pour le Goncourt et l'Interallié, et Véronique Ovaldé avec La grâce des brigands (L'Olivier), pour le Renaudot et le Femina.

Côté étranger, le superbe premier roman du Britannique Patrick McGuinness, Les cent derniers jours (Grasset), qui nous emporte dans la Roumanie de Ceaucescu, figure parmi les favoris du Médicis et du Femina, tout comme Confiteor, de Jaume Cabré (Actes Sud), traduit du catalan.

Plébiscités par la critique et retenus par le Femina, Canada, de l'Américain Richard Ford (L'Olivier), et Transatlantic, de l'Irlandais Colum McCann (Belfond), pourraient aussi décrocher la timbale.