La politique passe au Salon - plutôt le politique, cette sphère de l'activité humaine qu'on ne conjugue pas souvent avec littérature! Pour clore une année fertile en affrontements, au cours de laquelle les générations et les idées se sont parfois côtoyées à la cadence éclair des médias sociaux, le Salon du livre, qui démarre mercredi, fait une large place aux acteurs politiques.

Profitant de l'occasion, l'équipe du cahier Lecture a posé à quelques-uns de ces participants politisés la question suivante: à l'ère de Twitter et des médias sociaux, pourquoi avoir choisi d'écrire un livre?

CLAUDE CASTONGAY - Député et ministre sous Robert Bourassa, père de l'assurance maladie

Le sujet de la santé est complexe et comprend bien des dimensions, ce qui se prête mal à ce type de médias. Je pense au blogue, qui facilite plutôt la chronique. Les médias sociaux et Twitter sont des instruments pour des réactions plutôt rapides, instantanées, alors que le livre est mieux adapté à l'analyse et à la réflexion. Et puis, il y a encore une grande partie des gens qui aiment bien tenir un livre en mains ou qui n'ont pas accès à un ordinateur. Cela étant dit, mon livre n'est pas disponible que sur papier, il est aussi en version numérique. Le Salon va permettre de rencontrer et d'échanger avec un grand nombre de personnes intéressées par le sujet de mon livre. Il est donc possible d'avoir une meilleure connaissance des idées, des attitudes de la population, de sa réaction à l'égard de notre système de santé.

Santé, l'heure des choix. Claude Castonguay, Boréal. Stand 433.

GABRIEL NADEAU-DUBOIS - Militant et ex-co-porte-parole de la CLASSE

L'instantanéité qui règne dans les réseaux sociaux permet certes de rejoindre des milliers de personnes rapidement. Le rôle du livre est tout autre: contre l'instantanéité de l'opinion, il offre la possibilité de la réflexion, à la fois à l'auteur et au lecteur. Si nous sommes parfois séduits par la rapidité du virtuel, le livre nous force à prendre le temps. Si les réseaux sociaux peuvent informer, je ne crois pas qu'ils puissent convaincre, et encore moins faire réfléchir. [Le livre] nous contraint à cesser de courir, pour découvrir, lentement, une pensée. Au Salon, j'espère surtout des rencontres. Avec des auteurs et des intellectuels, mais surtout avec de simples citoyens qui ont vécu, comme moi, l'intensité des derniers mois. Il me semble d'une importance capitale de réfléchir collectivement sur les événements du printemps dernier et sur leur caractère polarisé. Que révèlent-ils sur le Québec d'aujourd'hui et, surtout, de demain?

Le souffle de la jeunesse. Collectif (G. Nadeau-Dubois signe la postface), éditions Écosociété. Stand 532.

MAX GROS-LOUIS - Ancien chef huron de Wendake

Ce n'est pas moi qui ai écrit le livre, mais quand on est venu me voir avec le projet de biographie, l'idée m'a plu. Les livres servent à nous souvenir et à conserver des choses qu'on a tendance à oublier. Ils permettent aussi aux gens de mieux nous connaître: dans mon cas, il y a plein d'aspects de Max Gros-Louis qu'on ne savait pas et qu'on peut apprendre dans ce livre. Et quand on peut lire les idées de quelqu'un noir sur blanc, on comprend mieux sa pensée et on peut mieux le juger. Comme on dit, les paroles s'envolent et les écrits restent! Au Salon, j'ai invité bien du monde, des amis, et j'ai hâte de les voir.

Max Gros-Louis: le corbeau de Wendake. Alain Bouchard, éditions La Presse. Stand 516.

MARTINE DESJARDINS - Présidente de la FEUQ

Justement pour pouvoir écrire plus de 140 caractères et aller au bout d'une idée! Pour pouvoir définir le rôle des femmes dans la sphère politique et participer à un débat. J'ai écrit un texte pour l'Agenda des femmes parce que le militantisme féministe est toujours aussi nécessaire. Lise Payette me disait récemment revoir les mêmes questions qu'à ses débuts, par exemple sur l'avortement. La place des femmes est toujours à faire, il n'y a qu'à regarder le temps que cela a pris aux médias et aux divers acteurs politiques pour réaliser qu'il y avait une porte-parole femme dans le mouvement étudiant ce printemps, pour accepter que je ne m'exprime pas comme les porte-parole masculins. J'ai hâte de rencontrer les gens au Salon, je sais par les conférences auxquelles je participe qu'ils sont très curieux. Et aussi très inquiets. La question qui revient systématiquement, c'est: «à partir de maintenant, qu'est-ce qu'on fait?»

L'Agenda des femmes 2013. Collectif, éditions du Remue-Ménage. Stand 532.

JEAN COURNOYER - Député et ministre sous Jean-Jacques Bertrand et Robert Bourassa

Je ne suis pas encore un adepte de Twitter ou des médias sociaux. Je n'ai donc pas eu à choisir entre tweeter et écrire un livre. D'ailleurs, comment raconter une vie en 140 caractères? Un jour, peut-être, je diviserai mon autobiographie en sections de 140 caractères spécialement pour les «twitteux» qui peinent à en lire plus que cela d'une seule traite. Au Salon du livre, il sera intéressant de rencontrer ceux qui, même s'ils peuvent tweeter, ont encore le goût de tenir un livre dans les mains, de le mettre de côté en écornant les pages et d'en reprendre à loisir la lecture.

Dans le feu de l'action. Jean Cournoyer, éditions de L'Homme. Stand 547.

FRANÇOISE DAVID - Députée de Gouin, présidente et porte-parole de Québec solidaire

Écrire un livre, c'est se donner du temps pour réfléchir, mettre ses idées en ordre, proposer une vision du Québec. Ça ne se fait pas en 140 caractères! Le Salon du livre est pour moi un moment d'échange formidable avec des écrivains-es. C'est aussi se plonger dans l'univers des livres. Découvrir, apprendre! Et cette année, j'y amène ma filleule de 19 ans, qui n'y est encore jamais allée.

De colère et d'espoir. Françoise David, éditions Écosociété. Stand 532.

DJEMILA BENHABIB - Candidate péquiste défaite dans la circonscription de Trois-Rivières aux dernières élections

Les médias sociaux ne sont que de modestes outils, certes puissants, pour mettre en relation des personnes, mais qui affichent très vite leurs limites. Pour ceux qui se soucient de la forme, de la complexité d'une démonstration ou encore de la corrélation entre plusieurs problématiques, seul le livre peut apporter un substrat adéquat. C'est toujours avec des papillons au ventre que je me prépare au Salon du livre. Quoi qu'on en dise, le travail d'écriture est ardu et solitaire. En sortir, quelques fois, est nécessaire pour pouvoir y retourner avec un regard renouvelé. Les échanges avec les lecteurs et les auteurs contribuent à cette démarche. Ils constituent en cela une nourriture nécessaire qui alimente ma plume.

Des femmes au printemps. Djemila Benhabib, VLB. Stand 304.

Tables rondes et Conférences

> Politique, le malaise québécois

Avec Nicolas Lévesque, Mathieu Bock-Côté et Jean-Marc Piotte, vendredi à 20h.

> L'engagement politique des jeunes

Avec Josée Madeia Charlevoix, Gabriel Nadeau-Dubois, Martine Desjardins et Zéa Beaulieu-April, samedi à 14h.

> Le Québec est-il en panne de leadership?

Avec Laurent Lapierre, samedi à 15h15.

> Le développement minier au Québec: Eldorado ou mirage?

Avec Normand Mousseau et Alain Deneault, dimanche 14h30.

> Privé de soins: contre la régression tranquille en santé

Avec Bernard Émond et le Dr Alain Vadeboncoeur, samedi, 12h45

> De quoi le Québec a-t-il besoin en éducation

Avec Vincent Marissal, Jean Barbe et Marie-France Bazzo, samedi 15h00.

> La place des femmes au travail en 2012

Avec Monique Jérôme Forget, dimanche 15h30.

Photo: Ninon Pednault, La Presse

Françoise David