Une dizaine de performeuses et de créatrices participeront au cabaret Des filles qui ont de la gueule dans le cadre du Festival international de la littérature (FIL), mais il y aura une grande absente: Ève Cournoyer, qui nous a quittés en août dernier. En revanche, elle sera partout dans les mots de ses soeurs de scène. Parce que la scène, pour elles, est une solidarité.

Le cabaret Des filles qui ont de la gueule a été présenté pendant plusieurs années aux FrancoFolies. Il déménage maintenant au Festival international de la littérature, ce qui fait bien plaisir à sa directrice artistique et animatrice, Marie-Paule Grimaldi, slammeuse et poète, active et engagée. «Le Grand Slam a décidé de quitter le FIL après cinq années, ce que je trouvais vraiment dommage, parce que j'étais très heureuse que le slam soit accueilli dans une institution littéraire, dit-elle. Michelle Corbeil (directrice générale du FIL) a toujours aimé le slam et lorsqu'elle m'a invitée à présenter quelque chose, c'était tout naturel que je présente ce cabaret.»

Et c'est un très beau line-up féminin que Marie-Paule Grimaldi nous propose: Christine Germain, Isabelle Saint-Pierre, Catherine Cormier-Larose, Queen Ka, Claudine Vachon, Louise Bombardier, Geeta, Annick Lefebvre et Véronique Bachand prendront toutes la parole pour un temps court mais intense. «Je voulais présenter plein de manières de faire, des paroles fortes, très assumées, et des points de vue différents pour ne pas qu'on puisse catégoriser cela uniquement en poésie de feeeemmes, note-t-elle en appuyant sur ce mot. Le fait d'être entre femmes, c'est rassurant, il y a une solidarité et une protection. Les créatrices qui font leurs trucs sur scène, il faut les appuyer, car elles se font encore juger de toutes sortes de manières. Être femme, c'est encore à découvrir, à définir. Prendre sa place selon ses propres critères, c'est encore difficile. C'est un peu sauter dans le vide.» La soirée se terminera tout de même par un micro ouvert à tous, même aux gars. La solidarité n'est pas fermée.

Avoir de la gueule n'empêche pas la fragilité, ni la souffrance. Marie-Paule Grimaldi connaissait très bien Ève Cournoyer, à qui ce spectacle sera dédié. «Elle était du premier cabaret, se souvient-elle. Elle m'a beaucoup influencée, elle était importante dans ma démarche, car je l'admirais beaucoup. J'avais l'impression qu'elle chantait juste pour moi et beaucoup de femmes se retrouvaient dans ce qu'elle disait, des choses dures, avec sa voix claire et sensible... La semaine de son lancement, nous avons récupéré sa guitare préférée qui avait été mise en gage. En même temps qu'elle lance un album indépendant avec succès, on voit bien qu'elle avait des difficultés. Il y a un aspect social et politique là-dedans. Dans ce spectacle, nous sommes toutes des femmes marquées par des chemins plus indépendants. Et là, la meute est réunie, parce que nous sommes des louves solitaires.»

On se demande si le titre du spectacle ne met pas un peu de pression sur les participantes... «Non, elles ont vraiment de la gueule! répond du tac au tac Marie-Paule Grimaldi. Dans la vie et sur scène, c'est pour ça qu'elles ont été choisies. À partir du moment où l'écriture devient un engagement, il se passe quelque chose de très fort, qui est ressenti. Une vérité».

___________________________________________________________________________

Des filles qui ont de la gueule, ce soir, à 20h, au Lion d'Or. www.festival-fil.qc.ca