Le Brésil refuse de lâcher l'écrivain Cesare Battisti. La Cour suprême a rejeté mercredi soir la demande d'extradition formulée par l'Italie et ordonné la libération de l'ex-militant italien d'extrême gauche, condamné par contumace en 1990 à la perpétuité pour deux assassinats et pour complicité dans deux autres, commis en 1978 et 1979. Il a toujours nié les faits.

L'Italie a annoncé qu'elle allait saisir la Cour internationale de justice (CIJ). Le ministère des Affaires étrangères a précisé qu'il mettrait tout en oeuvre pour obtenir cette extradition, tandis que le président Giorgio Napolitano «déplorait» cette décision, évoquant un arrêt qui «contraste avec les relations d'amitié historiques entre les deux pays».

Le président du Conseil italien Silvio Berlusconi a parlé d'un «vive regret» dans un communiqué. «La décision ne tient pas compte de l'attente légitime que justice soit faite pour le peuple italien, et en particulier pour les familles des victimes de Battisti».

Une association de victimes du terrorisme a appelé l'Italie à refuser de participer à la prochaine Coupe du monde de football, qui se déroulera en 2014 au Brésil, alors que d'autres organisations ont lancé un appel au boycott des produits brésiliens.

Le Tribunal suprême fédéral, plus haute instance judiciaire du Brésil, a confirmé mercredi soir le refus d'extrader Battisti annoncé en décembre dernier par l'ancien président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, juste avant de quitter le pouvoir. Cette décision avait déjà suscité une vive colère du gouvernement italien.

Par six voix contre trois, les juges de la cour suprême ont d'abord rejeté la demande d'extradition, puis ordonné la remise en liberté de l'écrivain. Cesare Battisti a quitté tôt la prison de Papuda, et a été transféré à l'hôtel, a confirmé son avocat.

Lorsque la Cour a débattu de cette affaire mercredi après-midi, l'avocat du gouvernement italien, Nabor Bulhoes, avait estimé que le rejet de cette extradition constituerait «une grave violation des principes légaux et du traité d'extradition» entre les deux pays. L'avocat de Cesare Battisti, Luis Roberto Barroso, a répondu que le Brésil avait l'obligation morale de rejeter cette requête, notant que Rome avait accordé l'amnistie aux personnes condamnées pour des crimes politiques entre 1964 et 1985.

L'avocat a précisé qu'il allait effectuer des démarches auprès du ministère brésilien de la Justice pour régulariser la situation de l'écrivain, entré illégalement en 2004 sans passeport.

L'ancien militant de l'extrême gauche italienne a été arrêté en mars 2007, à Rio de Janeiro, après presque trois ans de cavale. Il s'était enfui en août 2004 de France, où il s'était installé en 1990 et reconverti en auteur de romans policiers, pour échapper à une extradition vers l'Italie. Il s'était évadé d'une prison italienne en 1981, avant d'être condamné par contumace pour deux assassinats et pour complicité dans deux autres, commis en 1978 et 1979.

Cesare Battisti, 56 ans, a toujours démenti avoir tiré sur quiconque. Il l'a réaffirmé dans un livre publié en 2006 en France, Ma Cavale: «Je suis coupable, comme je l'ai dit souvent, d'avoir participé à un groupe armé subversif et d'avoir porté des armes. Je n'ai jamais tiré sur personne», écrivait-il.