Les romans et essais de Jean-Christophe Rufin sont porteurs de thèses qui ont suscité parfois de vives polémiques. Les causes perdues (aide humanitaire), La Salamandre (amours exotiques), Globalia (mondialisation libérale), Le parfum d'Adam (terrorisme écologique) et même son prix Goncourt Rouge Brésil témoignent d'un humanisme, mais surtout d'inquiétudes certaines sur le destin des hommes et des femmes et sur leurs capacités de vivre ensemble.

Katiba ne fait pas exception. Rufin nous plonge dans la rigueur du Sahara où les frontières de la Mauritanie, de l'Algérie, du Tchad et du Mali se (con)fondent dans les dunes. C'est un monde hostile, peu peuplé, idéal pour des camps nomades de formation d'Al-Qaïda, des katibas. Les terroristes recourent à l'internet et au GPS.

Ils fomentent un assassinat au Quai d'Orsay, au cours d'un dîner officiel en l'honneur d'un ministre émirati du Pétrole. Plusieurs services secrets sont sur la piste: algériens, américains et privés. Les coups fourrés abondent et la tension monte à mesure que progresse le récit. Avec Le parfum d'Adam, Rufin faisait ses classes avec le genre thriller.

Ce deuxième opus, qui remet en scène quelques personnages secondaires mais essentiels du premier, est beaucoup mieux maîtrisé. Les lignes narratives sont nombreuses et le rythme va sans cesse en s'accélérant. Rufin redonne ses lettres de noblesse au roman d'espionnage.

Comme son maître avoué John LeCarré, il soigne beaucoup la profondeur et la complexité de ses personnages tous burinés par l'Histoire. Il arrive ainsi à mieux nous faire comprendre le fanatisme islamiste, la vie au désert et la menace réelle d'une autre souche de la bande à ben Laden.

Al-Qaeda au Maghreb. Katiba. Jean-Christophe Rufin. Flammarion 2010, 390 pages, 32,95 $.