L'auteur sud-africain Deon Meyer a un irrésistible pouvoir d'attraction. Il suffit de déposer sa dernière mouture sur son bureau pour attirer soudainement l'intérêt des collègues.

On comprend pourquoi en terminant la lecture de 13 heures, roman qui tient en haleine sur près de 500 pages. Des trois romans policiers qui nous venons de lire à la chaîne, celui-ci est le meilleur. Trois oeuvres qui, coïncidence, se déroulent sur trois continents différents. Et où la filiation, les liens du sang, ne sont jamais bien loin.

Se déroulant au Cap, en Afrique du Sud, 13 heures est le plus urbain des trois livres. Avec un nom pareil, on sent déjà une certaine parenté, du moins dans la formule, avec la célèbre série américaine 24. C'est vrai. Dès l'amorce, Meyer installe plusieurs scènes où l'action se passe en même temps.

Voici donc l'inspecteur Benny Griessel, trop tôt sorti du lit par un appel relatif au meurtre sordide d'une jeune femme. Griessel a à peine le temps d'avaler son premier café qu'il se retrouve avec un second cadavre sur les bras.

Le meurtre de la jeune femme se complique lorsque l'on apprend que cette dernière est une touriste américaine et que sa compagne de voyage est en fuite, poursuivie par les mêmes assassins. Pourquoi? On le saura au fil des pages de ce roman haletant où l'intrigue se joue sur fond de guerre de nerfs interraciale entre policiers.

Les personnages de Meyer sont très bien dessinés, parfois caricaturaux mais toujours attachants. Son roman va droit au but, sans perdre pied dans des détails inutiles.

Saga islandaise

Un jour, Karen, la meilleure amie de Maria, retrouve celle-ci pendue dans sa maison de campagne. Suicide, conclut-on à la suite d'une courte enquête du coroner. «Un décès discret, une mort presque polie», comme le raconte si bien l'auteur, Arnaldur Indridason

Mais Karen trouve cette conclusion hâtive. Elle rencontre l'inspecteur Erlendur et lui remet une cassette qui constitue le point de départ d'une enquête tortueuse, où les pistes se multiplient et s'embrouillent. Erlendur doit donner de la tête partout en même temps. En plus d'être confronté à ses propres démons; la mort de son frère, la dérive de ses enfants, la haine de son ex-femme.

Ici, la filiation est partout. Quelle était la nature de la relation entre Maria et sa mère? Quels secrets entourent la mort de son père? Et quel regard porte son mari, Baldvin, sur cette famille torturée?

Le tout se déroule dans une Islande aux paysages parfaitement esquissés et aux noms géographiques aussi rugueux que la lave des volcans.

On l'a dit, le nombre de pistes sur lesquelles Erlendur est lancé est imposant, parfois déroutant. On aurait apprécié un resserrement dans cette pluie de petits détails qui, bien sûr, ont tous leur place comme dans un casse-tête de mille morceaux, mais nous font parfois craindre de perdre le fil du propos.

Dans le fond de l'Amérique

Ce n'est pas le cas dans La nuit de Tomahawk de Michael Koryta qui se passe cette fois dans un bled plutôt perdu des États-Unis. Tomahawk, Wisconsin, vous connaissez? Oui, ça existe. C'est là que travaille Nora Stafford, volontaire et plutôt jolie proprio du garage familial qu'elle tient à bout de bras.

C'est à bord de sa dépanneuse qu'elle va à la rencontre de Frank Temple III, le beau mec de l'histoire et de Dave O'Connor, personnage ambiguë et menteur, les deux hommes ayant été impliqués dans un accident de la route. Nora saura vite à quoi s'attendre avec ses deux clients qu'elle avait d'abord accueillis comme les sauveurs de sa fin de mois: Frank cherche les ennuis (venger la mort de son père) et Dave les attire!

La force de Koryta, c'est le rythme. Ce roman est bien construit, monte d'abord en pente douce avant de plonger dans une spirale de plus en plus accélérée. On adore aussi le contexte, le lieu. Ici, dans l'Amérique profonde, tout n'est que lacs et forêts sauvages. On fait craquer les branches mortes dans les sous-bois. On goûte à l'eau de l'averse. On bidouille le vieux moteur de la chaloupe. Fermez les yeux et remémorez-vous vos aventures de jeunesse à la campagne. C'est là! Mais avec une tonne d'actes violents à donner froid dans le dos.

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13 HEURES. Deon Meyer. Seuil Policiers. 464 pages, 39,95 $.

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LA NUIT DE TOMAHAWK. Michael Koryta. Seuil Policiers. 360 pages, 34,95 $.

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HYPOTHERMIE. Arnaldur Indridason. Métaillé Noir. 304 pages, 29,95 $.