On ne débarque pas dans l'univers de Claire Castillon en plongeant dans Les cris. On l'apprivoise d'abord avec Insectes, puis avec On n'empêche pas un petit coeur d'aimer.

Les nouvelles qu'ils regroupent sont autant de fenêtres ouvertes sur un monde où l'amour se conjugue au mode «Je ne crois pas en toi, couple», autant de visions fugaces du «monstre textuel» qui vit dans la tête de l'écrivain au visage d'ange romantique mais à la plume trempée dans le vitriol, acérée comme la lame d'un couteau.

Qui tranche et hache plus que jamais dans ces Cris, lancés au moyen de phrases courtes et percutantes. Le «monstre textuel», ici, ne se cache plus. Il est nommé, il tient la plume. Se met à nu. Mord. Et, bien sûr, crie.

Les cris, c'est l'histoire d'une rupture sentimentale. Adam aime être avec elle, femme jamais nommée mais présente dans chaque mot, chaque point, puisque c'est elle qui les pose. Il aime dormir avec elle, faire l'amour avec elle, rire avec elle, vivre avec elle. Mais il ne sait pas s'il l'aime.

Histoire d'une rupture, donc. Mais aussi - surtout? - l'histoire de la transmutation de ladite rupture en carburant pour celle qui la vit, femme de lettres qui s'en nourrit pour créer.

Monstrueux? Oui, mais pas par l'horreur ni le dégoût de la chose qui s'éveille sous nos yeux. Plutôt par sa puissance absolue. Celle, indomptable, de la force créatrice.

Il n'y a pas de préméditation, pas de cynisme dans cette force, dans ce monstre. Il y a. Point. C'est aussi fascinant que dangereux. Mais, on le sait: Claire Castillon ne donne dans la dentelle que lorsqu'elle décide d'en porter. Pas quand elle écrit.

___________________________________________________________________________________________

* * * 1/2

LES CRIS. CLAIRE CASTILLON. FAYARD, 189 PAGES, 27,95 $.