Il faut être fou pour penser que l'on peut être «pire que le führer». Un peintre allemand, habitant au 18, de la Betrachtungstrasse à Munich en 1933, se demande si, pour échapper à la montée du nazisme (donc à Hitler), il ne vaut pas mieux, non pas feindre la folie (tel Hamlet) mais y plonger, se livrer à elle, passer à l'acte du fou, être «pire que lui».

L'occasion se présente quand un officier lui passe une commande du chancelier: le portrait d'une enfant blonde et radieuse pour incarner l'avenir de la nouvelle Allemagne. Il accepte. On lui fait parvenir le modèle. Au lieu de la peindre, il va en faire sa chose, l'instrumenter, l'équiper d'appareils mécaniques pour en faire une poupée articulée, incarcérée. Avec un complice prothésiste, il construit en métallisant le corps de la fillette, un enfant Frankenstein... Avec cette idée tordue, Stéphane Velut a construit sa première fiction.

On s'y laisse prendre (vieux procédé, ce roman serait le journal retrouvé du peintre), il y a du suspense quand des officiers viennent juger de l'avancement du tableau, quand la femme de ménage soigne le corps ensanglanté de la «machinerie vivante», mais au fur et à mesure que le roman avance et que Velut symbolise le nazisme en machine à fabriquer des chiens, les influences du romancier débutant se font sentir.

L'on se dit que, malheureusement pour lui, on a lu La métamorphose et Rhinocéros. Mais ce Velut est à la ville neurochirurgien et anatomiste, il laisse donc de bonnes pages techniques...

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Cadence. Stéphane Velut. Christian Bourgois, 190 pages, 29,95 $.