L'écrivain français Pierre Bottero est mort dimanche. Il a perdu la maîtrise de sa moto sur une route, aux alentours d'Aix-en-Provence. Il avait 45 ans. Il laisse dans le deuil sa femme et leurs deux filles. Toute l'équipe de la maison d'édition Rageot, qui a cru en lui et lui en elle. Ses amis de Hachette, qui distribuaient ses oeuvres au Québec. Des centaines de milliers de fans. Et au moins une journaliste.

J'ai fait la connaissance de Pierre Bottero, le romancier, en 2003, dans les pages du premier tome de La quête d'Ewilan. J'ai été ensorcelée par son héroïne, Ewilan. Emportée à Gwendalavir, le monde parallèle qu'il a créé pour elle et pour nous. Envoûtée par les concepts qu'il a si merveilleusement imaginés - le «pas de côté», pour traverser d'un univers à l'autre; l'art du Dessin, qui permet de rendre temporairement réel ce qu'imaginent les personnages possédant le don du Dessin.

En compagnie de son compatriote Erik L'Homme, Pierre Bottero venait de donner des lettres de noblesse à la fantasy contemporaine à saveur française. En ces années où les librairies regorgeaient de «nouveaux Harry Potter» et de pâles ersatz du Seigneur des Anneaux, il a créé. Pas imité. Il a initié son propre voyage. Pas simplement pris le train en marche.

J'ai rencontré Pierre Bottero, l'homme, en 2004. Il participait au Salon du livre de Montréal. Pour plusieurs, il était un auteur parmi des centaines. Le jeune public, lui, averti, a changé la donne. Est venu le voir en grand nombre, lui parler, l'écouter, échanger. En 2007, il était de retour. Invité d'honneur, cette fois-là.

Lors de notre première conversation, il m'a avoué qu'il n'avait jamais rêvé d'être romancier mais avait beaucoup rêvé tout court. Que Gwendalavir et tous ceux qui l'habitent, porteurs de lumière ou d'ombres, étaient nés de ces rêves.

Il disait cela avec cet accent du Sud français, qui chante pour tous, qui berce pour moi puisqu'il est celui de ma petite enfance. Il disait cela avec une sincérité qui ne s'est pas démentie. Il écrivait par amour. De l'écriture. De ces jeunes pour lesquels il avait respect et admiration. C'était mutuel.

L'opportunisme n'était pas à son agenda. Là se trouvait une partie des raisons de son succès auprès d'eux. L'autre étant son talent.

Pierre Bottero a publié quatre trilogies. La quête d'Ewilan, Les mondes d'Ewilan, Le pacte des Marchombres, L'Autre. Une oeuvre qui restera. Chez moi, elle possède son propre rayon, dans l'une de mes bibliothèques. Je n'arrive pas encore à croire qu'il ne sera jamais rempli. Pierre Bottero a fait, beaucoup trop tôt, le «pas de côté».