Est-ce que le président américain Barack Obama est devenu le successeur d'Oprah Winfrey? On le sait, la star de la télé, Oprah Winfrey, a lancé plusieurs auteurs vers le sommet de la notoriété par une simple mention. Bref, si Oprah parle d'un livre, il devient un bestseller.

Le roman Netherland de Joseph O'Neill, un écrivain irlandais qui vit à New York depuis une dizaine d'années, a bénéficié d'un appui semblable. Barack Obama a parlé de son roman en bien, et voilà que Netherland est monté dans les palmarès. Qu'est-ce que le président Obama a vu dans ce roman mélancolique?

Nous sommes à New York, dans l'atmosphère incertaine qui règne après le 11 septembre. Hans et Rachel vivent avec leur petit garçon au Chelsea Hotel, haut lieu de la vie bohème à New York. Pourquoi cet hôtel? Leur quartier, trop près du site des attaques, est devenu inhabitable.

Même si Hans est un analyste financier pour une société pétrolière, il a des goûts plutôt bohèmes aussi. Lorsque sa femme Rachel, sans trop d'explications, le quitte et rentre à Londres avec leur fils, Hans est libre. Il peut s'adonner à l'errance. On sent qu'il est presque soulagé par le départ de sa femme. Attention: Netherland n'est pas une histoire d'amour.

C'est plutôt une histoire d'amitié entre Hans et Chuck Ramkissoon, un immigrant trinidadien qu'il rencontre au fil de ses promenades à New York. Qu'est-ce qui lie cet analyste financier à cet homme des Caraïbes? Le cricket. Tous deux adorent le sport, mais plus encore, ils sont concernés par ce que ce sport représente à New York. Le cricket, c'est le sport des immigrants, des hommes invisibles, de ceux qui peuplent, non pas Manhattan où vit Hans, mais les coins lointains de New York: le Queen's, Brooklyn, Coney Island.

Voilà la force de ce roman: le portrait d'un New York inconnu, insoupçonné, celui que vous ne voyez pas lorsque vous y allez en touriste. Moi, à mon prochain passage dans cette ville (au plus vite, je l'espère!), je prends mon exemplaire de Netherland et je visiterai les quartiers où sont passés Hans et son ami Chuck, cet escroc qui finit mal.

Car nous voyons ce que Hans ne voit pas du tout. Son ami Chuck, optimiste, dynamique, qui rêve de bâtir le plus joli terrain de cricket jamais vu, est un petit gangster, un racketeur. Sa cible préférée, hélas, c'est son propre peuple. La vengeance est donc annoncée.

Il faut saluer l'audace du président des États-Unis qui a encouragé ses concitoyens à lire ce livre mélancolique sur le sort des hommes invisibles.

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Netherland. Joseph O'Neill, traduit par Anne Wicke. L'Olivier, 299 pages, 34,95 $.