L'écrivain et diplomate français Paul Morand, ambassadeur en Roumanie en 1943 et 1944, est célébré à Bucarest dans le cadre d'une manifestation visant à restituer au public l'image de cet «Européen», avec ses lueurs et ses zones d'ombre.

«Cette manifestation présente le séjour de Paul Morand en Roumanie, mais aussi le reste de sa carrière - littéraire et diplomatique -, apportant des éclairages nouveaux, assez étonnants», a déclaré à l'AFP l'un des commissaires de l'événement, le professeur Michel Collomb.Un colloque réunissant des historiens, écrivains et critiques littéraires roumains et français, complété par une exposition recueillant des documents inédits et des dessins signés par Morand «permet de corriger un peu l'image très négative qui était donnée de son séjour ici», a-t-il ajouté.

Proche du régime de Vichy, Morand (1888-1976) fut nommé en 1943 ambassadeur de France en Roumanie, pays allié d'Hitler et menacé par l'avancée des troupes bolchéviques. Son attitude durant la guerre lui valut l'inimitié du général Charles de Gaulle, qui empêchera longtemps son entrée à l'Académie française.

«On voit que sa mission à Bucarest n'était pas facile, alors que Morand a rencontré une opposition au sein même de son ambassade, dont une partie était conquise aux thèses de la France libre, sans parler de la situation militaire difficile sur le front», a souligné M. Collomb.

Dans son intervention, l'historien roumain Carol Iancu a notamment regretté que Morand «ne se soit pas fait connaître par une quelconque action en faveur des Juifs» déportés en Transdniestrie par le régime du maréchal pronazi roumain Ion Antonescu.

Le critique littéraire Ion Pop a pour sa part épluché la presse roumaine de l'époque pour analyser l'accueil réservé au diplomate et à son oeuvre, allant de l'admiration totale - «l'un des écrivains les plus illustres du globe» - à des critiques virulentes, déplorant l'image «caricaturale» qu'il a donnée de la Roumanie dans son livre «Bucarest».

M. Collomb souligne néanmoins que Morand est «associé à l'image d'une Roumanie très libérale, avec une aristocratie empreinte de culture française, une Roumanie intégrée dans l'Europe intellectuelle».