À l'instar de la petite Bérénice de L'avalée des avalés, Samuel est un enfant à la vision tragique qui se débat dans une famille névrosée et entretient des rapports problématiques avec son identité juive. Il traverse une crise existentielle bien propre à son âge, questionnant la religion, l'univers et la sexualité, mais sa première caractéristique demeure son humour noir, vulgaire et décapant. Dans ce roman initiatique sous forme de satire, David Fitoussi, né en France, élevé à Montréal, puis maintenant installé en Israël, suit la quête identitaire d'un jeune Français de la banlieue parisienne immigré au Québec à la fin des années 1970.

Ignorant la morale et les scrupules, loin de la candeur à laquelle on s'attend pour un enfant de 11 ans, Samuel critique sévèrement le monde qui l'entoure à coups de sarcasmes. Il rêve de «tomber sur une bonne salope» dans le métro, se moque de tout, exécrant par-dessus tout l'hiver canadien et l'horrible accent québécois. Il déteste les politesses artificielles. En effet, la politesse ne lui sied pas. Soudain pris par un désir d'affirmer son identité juive, Samuel décide qu'il ne mangera plus que casher. Admirant le judaïsme de son père qui a disparu de sa vie, l'adolescent découvre, en revanche, que le Talmud ne permet pas «d'éjaculer en enculant sa femme», un interdit qui le refroidit, ne tenant pas à «mourir ignorant». À travers cet acide roman burlesque, David Fitoussi fait un portrait critique des clichés culturels et écorche au passage les valeurs de la société québécoise, le rêve d'indépendance et les intellectuels québécois, ces «syndicalistes à grande gueule reconvertis en pessimistes». La bar-mitsva de Samuel jette un regard cynique et désabusé sur le monde dans un bal parfois un peu foutoir, mais d'une causticité libérée de tous les interdits.

 

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La bar-mitsva de Samuel

David Fitoussi

Marchand de feuilles, 2008, 303 pages, 22,95$

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