Seize millions de gens qui l'écoutent chaque mois sur Spotify. Un contrat avec Interscope, filiale du major Universal. Des collaborations avec Vince Staples et Khalid (qui sera aussi à Osheaga). Un nouveau clip réalisé par Stromae. Entrevue avec Billie Eilish, la star américaine montante de 16 ans, qui sera à Osheaga, le 4 août.

Fin du mois de mars dernier. Nous sommes au Corona pour rencontrer Billie Eilish, quelques heures avant son spectacle. Il est 15 h, mais des admirateurs font déjà la file dehors pour être aux premières loges.

La star montante américaine a 16 ans. Sa mère est avec elle. « Nous n'avons jamais joué dans ce genre de salle de théâtre d'époque auparavant », nous dit cette dernière en admirant depuis le balcon le plafond enjolivé de peintures ornementales du Corona.

« Il va y avoir des gens ici ? »

- Oui, le spectacle affiche complet, lui répond-on.

- Extraordinaire  !

« Oui ! », lance ensuite Billie avec enthousiasme quand on lui demande s'il s'agit de sa première visite à Montréal.

Étonnée de se produire dans une salle de 750 places qui affiche complet ? « C'est insensé, tout ce qui m'arrive. Je suis allée à Milan pour la première fois de ma vie. Je ne pensais jamais aller en Italie, ni en Australie, à Singapour... J'y vais pour mon art et les gens aiment ce que j'ai fait, à la base, pour moi. C'est beau. »

Lors de notre rencontre, Billie en est aussi à sa première tournée à bord d'un autocar. « C'est beaucoup mieux, souligne sa mère. Pas d'attentes dans les aéroports et de frais en extra pour les bagages. Billie aime beaucoup la mode, donc elle peut apporter tous les vêtements qu'elle le désire. »

« Force is Female [la force est féminine] », peut-on par ailleurs lire derrière les espadrilles Nike que porte Billie Eilish, qui prend la pose pour le photographe.

C'est connu de son entourage ; Billie Eilish refuse de sourire sur commande. Elle veut être photographiée au naturel et selon son humeur du moment. « Je ne dis jamais oui. Je vais sourire si j'en ai envie, mais pas si on me le demande. »

LES DEUX PIEDS SUR TERRE

Écoutée par 16 millions de personnes chaque mois sur Spotify, un contrat avec Interscope, filiale de Universal et des collaborations avec de grands noms de la musique, Billie Eilish vit un conte de fées.

« C'est extraordinaire, tout ce qui se passe, mais cela reste une affaire de famille, souligne sa mère. Mon mari est aussi dans l'équipe de tournée. Nous étions acteurs quand nous étions jeunes, donc nous avons l'habitude des tournées. C'est routinier. Le point culminant de chaque journée est le spectacle. »

« Il n'y a rien au monde qui me touche autant que de voir le regard que les gens portent sur moi à chaque spectacle. C'est la raison pour laquelle toute la routine de tournée est tolérable. »

- Billie Eilish

AVEC SON FRÈRE

Billie Eilish a écrit ses premières chansons avec son frère (Finneas O'Connell, vu dans Glee et Modern Family). Elle compose au piano et au ukulélé. Mais comment expliquer son don pour les mélodies ?

Billie a fait partie de la prestigieuse chorale des enfants de Los Angeles. « J'ai grandi en étant entourée de musique. C'était partout dans ma vie avec mon père, ma mère et mon frère, raconte-t-elle. Mon frère est mon meilleur ami. Nous avons une grande confiance et une grande ouverture l'un envers l'autre. »

C'est avec lui que Billie a écrit son premier tube, Ocean Eyes, quand elle avait 13 ans. Un peu par hasard... « C'est mon professeur de danse qui m'a demandé une chanson pour un spectacle. On a sorti la chanson sur SoundCloud un mercredi pour nous et nos amis, mais cela nous a dépassés. »

Sa chanson Bellyache traite du sentiment de culpabilité à travers les yeux d'un adolescent qui vient de commettre un meurtre. « Bien entendu, cette chanson est fictive, mais elle a des niveaux d'interprétation plus profonds », souligne son auteure.

Sur son album Don't Smile at Me, sorti en 2017, on retrouve des chansons plus organiques au piano. D'autres plus électros. « Je le répète souvent, mais je n'aime pas l'idée des genres. Je n'ai pas un seul son... Je ne suis pas une chanteuse pop. Je suis une artiste et c'est tout. »

En cette ère de diffusion en continu et de réseaux sociaux, Billie Eilish rejette le modèle qui l'a vu naître. « Aujourd'hui, on peut rendre n'importe qui célèbre », lance-t-elle.

« Je hais l'internet. C'est la raison pour laquelle je suis où je suis, mais tout appartient à quelqu'un aujourd'hui sur l'internet, déplore-t-elle. J'ai lu un truc l'autre jour qui disait : "L'internet était jadis une évasion de la vie, alors que la vie est maintenant une évasion de l'internet." Tout ce qu'on fait aujourd'hui a un lien avec l'internet. »

UNE COLLABORATION AVEC STROMAE

En mars dernier, Billie Eilish nous annonçait en primeur un projet à venir avec Stromae.

« Je ne sais même pas si je peux en parler, mais nous travaillons ensemble sur une collaboration, nous disait-elle. Je l'admire depuis des années. Il y a cinq ou six ans, c'est via la danse que je suis tombée sur sa chanson qui parle du cancer [Quand c'est ?]. J'étais incapable de me remémorer son nom et trois ans plus tard, j'ai entendu quelqu'un parler de Stromae à la télévision, et j'ai dit : "Fuck, c'est le nom que je cherchais !" C'est là que je me suis plongée dans son art. Ses clips sont hallucinants. »

Dans une rencontre avec son label Universal, des membres de son équipe lui ont demandé avec quel artiste elle voudrait collaborer. « J'étais sur le point de répondre personne quand ma mère m'a rappelé à quel point j'aimais Stromae. [...] Mon éditrice, Alexandra Baker, a travaillé avec lui, donc nous avons organisé une rencontre. »

Et voilà que le 11 juillet dernier, Billie Eilish a dévoilé un clip pour sa chanson Hostage, réalisé notamment par Stromae sous sa bannière Mosaert (avec Luc Junior Tam et Henry Scholfield), juste avant de débarquer à Osheaga.