Au milieu de maints questionnements sur l'origine et les styles des artistes invités, les responsables de la programmation ont livré hier un bilan plutôt souriant du 27e festival Nuits d'Afrique, qui s'est terminé dimanche.

Au cours des 12 jours précédents (du 9 au 21 juillet), quelque 500 artistes de 30 pays ont participé à 90 concerts et activités diverses dans le Village Nuits d'Afrique, monté depuis trois ans dans le Quartier des spectacles de même qu'au Cabaret du Mile-End, à La Tulipe, au Métropolis et, bien sûr, au Club Balattou du boulevard Saint-Laurent, berceau du festival fondé par Lamine Touré.

Le public a bien répondu à ces prestations données «sous le sceau de la qualité», disait hier Hélène Dimanche, responsable de la programmation avec Frédéric Kervadec. Malgré le temps qui passait de lourd à incertain...

Sur la thématique du désert mise de l'avant cette année, les programmateurs ont salué les performances de «la rockeuse du désert», l'Algérienne Hasna El Becharia, du Krar Collective d'Éthiopie (le krar est une lyre à six cordes) et celle de cette Caravane pour la paix venue du Mali et composée de trois groupes de blues-folk touareg (Tartit, Imhartan et Mamadou Kelly).

Parmi les «légendes» qui ont joué dehors ou en salle, mentionnons les Antillais de Kassav, les rois du zouk que l'on connaît bien; les Skatalites, pères du reggae jamaïcain; l'Orquesta Aragón de Cuba; et la plus connue des Béninoises de New York, Angélique Kidjo, la marraine de Nuits d'Afrique.

Voilà qui ne fait pas beaucoup d'Africains, ont souligné hier certains observateurs. Et on est encore loin du continent avec le Balkan Beat Box (États-Unis/Israël), les Mexicains de 3 Ball Monterey et les Louisianais du Stooges Brass Band...

Les gens de Nuits d'Afrique sont conscients de la précarité de l'équilibre de leurs choix qui englobent une partie des musiques du monde - vaste champ en termes d'influences africaines, il est vrai - et le virage vers les sons actuels amorcé en 2011 avec Nuits d'Afrique 2.0 et ses convergences numériques.

D'autres aspects entrent en ligne de compte, des coûts de transport de la lointaine Afrique à certaines difficultés de nature consulaire (visas, etc.), comme le soulignait hier Solo Soro, animateur ivoirien de France Inter qui passe une partie de son temps dans les festivals world.

«Certains fonctionnaires, au Canada et ailleurs, souvent sans raison valable, empêchent des groupes africains d'aller se produire dans leur pays. Cela mène à des gaspillages de ressources - pour les hôtels et les avions, notamment -, en plus de priver le public de découvertes artistiques.»

Faute de visas, les Marocains de Mazagan n'ont pu se produire au festival Nuits d'Afrique cette année; le groupe a été remplacé par Awadi qui, pour une raison du même ordre, a joué sans son percussionniste.

Le budget 2013 de Nuits d'Afrique avoisinait les 2 millions de dollars, a précisé à La Presse Ruba Al Chaer, chargée du développement et des relations gouvernementales. Cette somme est ventilée comme suit: 31% viennent des subventions, 53%, des commandites et partenariats privés, et 16% sont constitués de revenus autonomes. En hausse réelle cette année.

Même à maturité, Nuits d'Afrique continue de grandir.