Résidant de Berlin, l'Anglais Chris Clark est assurément l'une des pointures invitées à Mutek cette année. Renommé pour l'injection d'instruments acoustiques ou électriques dans sa musique électronique, applaudi pour son usage très personnel des synthétiseurs modulaires,apprécié pour ses indéniables qualités de compositeur, Clark préconise un concert solo où il repart de zéro chaque fois qu'il se présente sur scène.

Joint à Genève avant qu'il ne quitte la Suisse pour le Québec, il explique les fondements d'un travail foisonnant et inspiré, qui l'a mené à créer plusieurs albums et maxis sous étiquette Warp depuis 2001, dont le récent Iradelphic. Certes parmi les plus prisées de la mouvance électro, les propositions de Clark sont chaudement attendues ce samedi à Mutek où il s'est produit il y a six ans et n'est pas revenu depuis.  

Il ne faut certes pas s'attendre à la reproduction de ses répertoires créés en studio, prévient-il d'entrée: «La scène et le studio sont deux bêtes différentes.  Bien sûr, on retrouve  des fragments de mes enregistrements lorsque je donne un concert mais... je reste trop séduit par le potentiel de l'interaction spontanée entre la musique électronique jouée en temps réel et l'auditoire venu à sa rencontre.»

Ainsi, devant nos yeux et nos oreilles, Clark revisite son oeuvre à travers une lutherie qui lui permet de la transformer en temps réel. Et donc, d'improviser.

«Ma table de mixage relie des technologies numériques, mais surtout des synthétiseurs analogiques (comme le Monge) et des synthétiseurs modulaires que j'ai moi-même personnalisés. Plusieurs jouets à ma disposition!»

Dans le terrain de jeu de Clark, chose certaine, la synthèse modulaire semble occuper une place prépondérante. Pourquoi donc?

Une explication technique s'impose: selon la définition wiki, «un synthétiseur est un instrument de musique capable de créer et de manipuler des sons électroniques au moyen de tables d'ondes, d'échantillons ou d'oscillateurs électroniques produisant des formes d'ondes que l'on modifie à l'aide de circuits composés de filtres, de modulateurs d'amplitude, de générateurs d'enveloppe.»  

Toujours selon wiki, les modules d'un synthétiseur peuvent être totalement indépendants,  c'est-à-dire «connectés entre eux de manière entièrement libre, autorisant ainsi une grande créativité dans le design sonore. La combinaison des signaux générés par plusieurs modules en une sortie audio permet à un nombre potentiellement infini de configurations, ce qui conduit à un nombre potentiellement infini de sons.»

«Les claviers modulaires, soutient Chris Clark, me permettent de choisir mes sons et mes textures à la seconde près. Tu peux créer ce que tu veux en temps réel ainsi transgresser toutes les règles. Assurément, je trouve ça plus gratifiant que la programmation des sons au moyen de technologies numériques. Avec le modulaire, donc, je repars à zéro. Je me fraie un chemin dans la pénombre. Et ça donne de bien meilleurs résultats à mon sens, car le feedback est immédiat; la force de l'esprit est mise à contribution en temps réel, c'est beaucoup plus réactif. Ainsi, je crois que mes meilleurs sons proviennent de la synthèse modulaire. Alors que je trouve ennuyeux de composer ma musique de concert avec des technologies numériques; cela équivaut à la création d'un hologramme, un plan d'architecte. Je préfère de loin l'improvisation, le contact direct avec le vrai son et le voltage qui l'alimente.»

On ne s'étonnera pas que Chris Clark joue lui-même tous les instruments repérables dans ses enregistrements.

«Vous savez, je ne me considère ni guitariste, ni violoniste ni percussionniste. J'aime tout simplement les sons pizzicatos que produisent les cordes, qu'il s'agisse de guitare ou de contrebasse ou de violon. J'aime aussi le son du piano. Je m'intéresse au langage des percussions. Depuis mes débuts en musique il y a une vingtaine d'années, j'alimente cet intérêt même si je suis associé à l'électro. J'adore collectionner des sons instrumentaux et textures sonores, pour ensuite en faire des arrangements.»

Aimerait-il se produire un jour avec d'autres musiciens? «Oui, je le ferai mais... Pour l'instant, le solo me satisfait amplement.  Je n'ai pas à me préoccuper de quiconque!»

Invité à Mutek,  Clark se produit samedi à la Satosphère de la SAT, 22h, dans le cadre du programme Nocturne 4.